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Asie-Pacifique: les responsables de l’éducation mettent en avant les défis liés aux droits, au climat et à la privatisation

Publié 14 février 2020 Mis à jour 19 février 2020

La réunion du Comité régional Asie-Pacifique de l’Internationale de l’Éducation s’est principalement penchée sur les réponses que peuvent apporter les syndicats aux menaces mettant en péril les droits humains et syndicaux, à l’impact des changements climatiques et à la privatisation croissante de l’éducation.

L’enseignement public est menacé dans nombre de pays de la région Asie-Pacifique. Tel était le message adressé à la réunion du Comité régional Asie-Pacifique de l’Internationale de l’Éducation (IEAP) par son Président Masaki Okajima, également Président du Japan Teacher’s Union.

Au cours de cette réunion, organisée les 1er et 2 février à Kuala Lumpur, en Malaisie, Masaki Okajima a également souligné que les syndicats de l’éducation devraient collaborer avec les organisations de la société civile pour mettre en œuvre des mesures concrètes pour instituer une éducation inclusive de qualité pour tous les individus.

Droits humains et syndicaux

Anand Singh, Coordinateur régional principal de l’IEAP, a abordé la question de la promotion et de la défense des droits humains et de la démocratie. Il a condamné la recrudescence et la persistance des violations des droits fondamentaux auxquelles se livrent les autorités de Hong Kong, de l’Inde et des Philippines. Les membres du Comité IEAP ont exprimé leur solidarité envers leurs collègues et la population de ces trois pays, appelant la communauté internationale à soutenir les campagnes contre les violations des droits et les attaques ciblant le personnel enseignant et les syndicalistes.

Il a été expliqué au comité que les membres du Hong Kong Professional Teacher’s Union étaient spécifiquement visé·e·s dans le cadre des troubles qui agitent actuellement le pays, le gouvernement accusant les enseignant·e·s d’inciter les étudiant·e·s à manifester. Le comité a également appris que la répression du secteur de l’éducation à Hong Kong pourrait impliquer une censure du contenu des programmes d’études, voire une contraction des budgets de l’éducation.

Raymond Basilio, membre du Comité de l’IEAP et Secrétaire général de l’Alliance of Concerned Teachers aux Philippines, a fait part de son expérience et de ses connaissances à propos de l’intimidation et du harcèlement de la direction des syndicats, observés actuellement dans son pays. « La pression exercée par les affiliés de l’Internationale de l’Éducation nous a été très utile », a-t-il déclaré, confirmant l’influence positive de la solidarité internationale pour sensibiliser à la situation des droits dans son pays. « Aujourd’hui, les responsables de ces exactions savent que la communauté internationale garde un œil sur leurs agissements », a-t-il ajouté.

Urgence climatique

Correna Haythorpe, Vice-présidente du Comité régional de l’IEAP et Présidente fédérale de l’Australian Education Union, a rappelé les feux de forêt dévastateurs qui ont causé des pertes dramatiques en termes de vies humaines, de faune, de flore et de patrimoine, et détruit plusieurs écoles en Australie. Étudiant·e·s et enseignant·e·s du pays sont descendu·e·s dans les rues pour réclamer la justice climatique et des mesures pour le climat, reprochant aux responsables du gouvernement de nier le lien entre ces incendies et les changements climatiques et de refuser de répondre à cette crise au travers d’une politique appropriée.

Neselinda Meta, membre du Comité IEAP et Présidente du Comité de l’éducation du Pacifique (COPE) a abordé en détail la question des changements climatiques, en y intégrant le point de vue des nations insulaires du Pacifique. Elle a souligné que la région du Pacifique était particulièrement exposée, rappelant que l’élévation du niveau des océans et les conditions climatiques extrêmes avaient une incidence sur les écoles et les moyens de subsistance. Elle a insisté pour que la thématique des changements climatiques soit incluse dans les programmes d’études et les campagnes de sensibilisation au sein des communautés.

David Edwards, Secrétaire général de l’Internationale de l’Éducation, a mis en avant le rôle des éducateur·rice·s et de leurs syndicats pour répondre aux défis climatiques actuels: « Les syndicats de l’éducation ont une responsabilité à long terme, ainsi qu’une vision et des réponses claires concernant les inégalités, le développement durable et les changements climatiques. Ils sont reconnus, prennent des engagements novateurs et ambitieux et continueront à le faire. »

Le comité a réaffirmé que les organisations membres de l’IE devaient rester unies pour répondre au besoin urgent d’agir en faveur du climat.

Privatisation de – et au sein de – l’éducation

Les organisations membres de l’Internationale de l’Éducation au Népal et aux Philippines ont rejoint la campagne Réponse mondiale, en vue de mener la lutte contre la commercialisation et la privatisation de l’éducation dans leurs pays. Les affiliés ont organisé des activités destinées à convaincre leurs membres, les responsables politiques et la population en général de s’opposer à l’introduction d’écoles payantes peu ou pas réglementées au sein du secteur de l’éducation. Aux Philippines, par exemple, les actions continues ont poussé le ministère de l’Éducation à faire appliquer les réglementations concernant les établissements scolaires aux écoles APEC, un partenariat entre les géants commerciaux Ayala Corporation et Pearson.

Objectif de développement durable 4

La réalisation de l’Objectif de développement durable 4 – assurer l’accès de tous les individus à une éducation de qualité, sur un pied d’égalité, et promouvoir les possibilités d’apprentissage tout au long de la vie – demeure prioritaire. Dans la région Asie-Pacifique, la contribution des syndicats à la réalisation de cet objectif au travers de la mise en œuvre, de la révision et du suivi des programmes est particulièrement importante.

Les syndicats de l’éducation régionaux ont exprimé leurs inquiétudes face aux importants retards accusés par les gouvernements du monde, très loin de pouvoir atteindre cet objectif à l’horizon 2030. Les manquements dans ce domaine ont été évalués par la communauté éducative dans un rapport de l’Internationale de l’Éducation publié en 2019. La Commission économique et sociale des Nations Unies pour l’Asie et le Pacifique indique également que, au rythme actuel des avancées, aucune des sous-régions de l’Asie-Pacifique ne parviendra à atteindre les cibles de l’Objectif de développement durable 4.

Rapport annuel de l’IEAP

Le rapport annuel de l’IEAP a été présenté au comité. Ce dernier offre un aperçu détaillé des actions engagées en 2019 par l’IE et ses affiliés dans cette région – 72 organisations nationales dans 36 pays représentant 7,7 millions de membres – pour promouvoir et protéger l’enseignement public inclusif et de qualité pour tous les individus. Ces actions ont permis de faire avancer le statut et les droits des enseignant·e·s et du personnel de l’éducation, de défendre les droits syndicaux et les libertés professionnelles, et de renforcer la capacité des syndicats.

Principales activités de l’IEAP:

•Préparer des recommandations et les présenter à la 5e réunion Asie-Pacifique de l’UNESCO pour l’éducation 2030.

•Développer les capacités et mener des campagnes de sensibilisation auprès des syndicalistes et du grand public, centrées sur les droits humains et syndicaux, le genre et l’inclusion au sein de l’éducation, les droits des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexuées, et les droits des populations autochtones.

•Organiser des formations aux fonctions de direction, adressées aux membres et à la direction des syndicats, ciblant en particulier les jeunes femmes dirigeantes.

Pour la période 2020-2023, le Comité IEAP projette de travailler dans les domaines suivants:

•Assurer la participation active des jeunes membres au sein des syndicats et de l’Internationale de l’Éducation;

•Inclure l’éducation aux changements climatiques dans les programmes d’études et la formation du personnel enseignant; et

•Renforcer les partenariats institutionnels, principalement au travers de la promotion du statut de la profession enseignante, des droits et des valeurs démocratiques.