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France : les syndicats français portent le deuil de l’enseignant assassiné Samuel Paty

Publié 19 octobre 2020 Mis à jour 13 octobre 2023

Des rassemblements organisés dans toute la France ont rendu hommage à Samuel Paty, 47 ans, un professeur d’histoire et de géographie qui a été victime d'un attentat terroriste près de son école, à Conflans-Sainte-Honorine en banlieue parisienne. Samuel Paty a été décapité à la suite d’une campagne sur Internet contre l’utilisation d’une caricature de Mahomet dans sa classe. Le meurtrier présumé, un jeune homme de 18 ans, a été tué lors d’un affrontement avec la police.

Samuel Paty avait déjà utilisé cette caricature dans ses cours sur la liberté d’expression les années précédentes, sans susciter le moindre problème. Il s’agit de l’une des images publiées par le journal satirique « Charlie Hebdo ». Cette caricature a été utilisée comme « justification » de l’attentat du 7 janvier 2015, qui a fait 12 mort·e·s et 11 blessé·e·s. Quatre autres personnes ont été tuées lors d’une prise d’otages en lien avec l’attentat de Charlie Hebdo dans un supermarché casher. Les personnes accusées d’avoir aidé les meurtriers sont actuellement jugées pour leur rôle dans ces attaques.

A cette époque, la France et le monde entier avaient réagi massivement contre l’attentat et s’étaient mobilisés pour défendre la liberté d'expression. Des journalistes ainsi que d’autres membres du personnel de Charlie Hebdo ont été tué·e·s dans leurs bureaux. Tout comme les journalistes risquent leur vie pour exercer leur liberté d’expression, l’assassinat de Samuel Paty montre que les enseignant·e·s peuvent aussi payer le prix fort pour le simple exercice de leur profession.

La campagne en ligne qui semble avoir inspiré l’assassin met en évidence un autre danger pour l’éducation et les sociétés libres. Les autorités scolaires et les enseignant·e·s peuvent se sentir obligé·e·s de s’autocensurer et d’éviter d’enseigner de manière à encourager la liberté d’expression et l’apprentissage.

Dans une déclaration commune des syndicats français, soutenue par d’autres syndicats, un appel au rassemblement a été lancé le dimanche 18 octobre à 15h pour rendre hommage à Samuel Paty. Des milliers de personnes se sont rassemblées sur la place de la République à Paris, mais aussi à Lyon, Marseille, Lille, Bordeaux, Toulouse, Nice, Nantes et dans d’autres villes. Le secrétaire général de l’Internationale de l’Éducation, David Edwards, a participé à une cérémonie devant le consulat français à Bruxelles.

Dans leur déclaration, les syndicats ont dénoncé le fait que Samuel Paty était depuis plusieurs jours avant son assassinat la cible d’une vindicte publique. Ils ont défendu un enseignement responsable, en soutenant : « Comme tout enseignant, il cherchait ainsi à préparer des jeunes à l’exercice de l’esprit critique, condition essentielle à une pleine citoyenneté. »

La déclaration poursuit en affirmant que les enseignant·e·s doivent être soutenu·e·s dans l’exercice de leur métier et que les syndicats sont « attachés à la liberté d’expression et que nous [les syndicats] refusons les logiques extrémistes et obscurantistes ».  Ils ont également déclaré que ce n’est pas par la haine qu'ils répondront à l’assassinat qui a coûté la vie à Samuel Paty, mais par « la promotion de la liberté, de l’égalité et de la fraternité ».

La France défend depuis longtemps la laïcité. Pour l’éducation, cela s’illustre par une stricte séparation de l’État et de la religion. L’État ne promeut ni ne décourage aucune religion. Le fait que les écoles et les enseignant·e·s soient attaqué·e·s sur la base de croyances religieuses va ainsi profondément à l’encontre des valeurs fondamentales de la démocratie.

Les syndicats de l’éducation ont rencontré le ministre de l’Education nationale, Jean-Michel Blanquer, et le Premier ministre, Jean Castex, le matin du 17 octobre afin de discuter de la protection des enseignant·e·s et de la liberté d’expression. Le Président Emmanuel Macron a annoncé qu’un hommage national sera rendu à Samuel Patty le mercredi 21 octobre. L’Internationale de l’Éducation a également été contact avec l’UNESCO pour discuter de ces sujets.

Dans une lettre adressée aux organisations membres françaises de l’Internationale de l’Éducation, le secrétaire général David Edwards a exprimé la solidarité et le soutien des éducateur·trice·s du monde entier et de leurs syndicats, et a affirmé les valeurs que Samuel Paty est mort en défendant. Il a déclaré que « la liberté de conscience et la liberté d’expression ont été durement gagnées ».

Dans la lutte pour défendre de la démocratie, le rôle des enseignant·e·s est essentiel afin de dissuader les forces qui pourraient la détruire. Et dans ce combat, Edwards souligne que « les organisations syndicales sont, plus que jamais, en première ligne ».