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Internationale de l'Education
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Danemark et Etats-Unis: un syndicat danois lance un fonds de défense juridique afin de soutenir un enseignant stagiaire

Publié 14 novembre 2014 Mis à jour 19 novembre 2014

Le syndicat danois des éducateurs/trices de la petite enfance, le BUPL, lance un appel aux autres affiliés de l'IE afin de réunir des fonds en vue de contribuer au financement des frais juridiques considérables pour la défense d'un membre du syndicat, accusé de « comportement inapproprié de nature sexuelle » dans une école maternelle de New York.

Malthe Thomsen, un enseignant stagiaire de Copenhague, avait débuté son stage au mois de février dans l'école maternelle internationale de Midtown Manhattan, à New York. Rapidement apprécié au sein de l'établissement, il s'est vu confier davantage de responsabilités, notamment en accompagnant les enfants lors de sorties scolaires ou en leur apprenant à dessiner.

Le BUPL fait remarquer que le film danois « The Hunt » révèle dans quelle mesure un enseignant peut facilement être accusé de pédophilie. Malheureusement, ce risque tient de nombreux jeunes hommes à l'écart de la profession, et notamment des postes d'enseignant ou d'éducateur de la petite enfance.

« Au Danemark, force est de constater que la crainte d'être accusé de pédophilie influence le comportement des éducateurs masculins », a souligné le Président du BUPL, Henning Pedersen, dans un article sur l'affaire Thomsen publié dans le magazine du BUPL, « Børn&Unge ». « Si les éducateurs masculins manquent de professionnalisme par crainte de suspicion, cela risque à terme d'affecter les enfants de façon négative. Entre 2008 et 2012, nous avons recensé environ 67 allégations de pédophilie à l'encontre d'éducateurs au Danemark, dont un cas seulement fut condamné par la Cour. »

Fin mai, alors que l'année académique arrivait à son terme, une collègue a envoyé un courriel à l'un de ses supérieurs, dans lequel elle prétendait que M. Thomsen avait un comportement inapproprié de nature sexuelle envers les enfants dont il avait la charge. Les dirigeant(e)s de l'école ont alors placé M. Thomsen sous surveillance discrète et ont interrogé ses collègues. Après quelques jours, alors qu'aucun fait n’était venu confirmer les soupçons, ils ont clôturé l'enquête et licencié l'accusatrice qui avait refusé de leur fournir les preuves de ses allégations.

« Les dirigeantes et dirigeants de l'école et les autres éducatrices et éducateurs, qui avaient passé un temps non négligeable avec la classe, ont tous déclaré n'avoir observé aucun comportement inapproprié de la part du stagiaire et ne tarissaient d'ailleurs pas d'éloges sur son travail auprès des enfants », a déclaré par la suite la Directrice de l'école Donna Cohen, dans l'un des sept courriels adressés aux parents dans les jours qui ont suivi l'arrestation. L'établissement a précisé qu'il avait reçu de nombreuses lettres de recommandation concernant M. Thomsen.

Agé de 22 ans, M. Thomsen a conservé son poste au sein de l'école maternelle internationale et a commencé à travailler dans le cadre de son programme d'été. Son accusatrice, en revanche, a décidé de porter sa plainte devant les autorités et vers la fin du mois de juin, la police a soumis le stagiaire à un interrogatoire. Au terme de plusieurs heures, les enquêteurs sont parvenus à obtenir des déclarations que les procureurs ont ensuite qualifiées d'aveux. Il fut arrêté pour suspicion d'attouchements inappropriés sur 13 enfants.

Les représentants de la police n'ont pas souhaité faire de commentaire au regard de l'interrogatoire de M. Thomsen. Cependant, l'un des avocats de l’enseignant, Jane H. Fisher-Byrialsen, a déclaré que la police avait eu recours à des techniques trompeuses dans le but d'intimider le suspect. Elle a ajouté que M. Thomsen n'était pas habitué aux techniques intransigeantes d'application de la loi américaine. Elle a déclaré que les enquêteurs avaient prétendu disposer de vidéos faisant état d'un comportement obscène et que, contrairement aux violeurs d'enfants qui étaient incarcérés pendant de nombreuses années, il serait simplement renvoyé au Danemark pour soigner ses problèmes. Rien n'atteste de l'existence de telles vidéos; les procureurs n'ont pas souhaité réagir sur les preuves qu'ils avaient réunies.

Dans un entretien télévisé, M. Thomsen a déclaré qu'il avait fait confiance à la police et avait été trompé par le sous-entendu selon lequel les enquêteurs avaient visionné des vidéos dans lesquelles il s'était livré à des attouchements inappropriés sur des enfants. « Je ne me rappelais pas avoir commis aucun des actes qu'ils me reprochaient », a-t-il déclaré.

Conformément à la législation de l'Etat de New York, la police est autorisée à mentir lorsqu'elle interroge un suspect, tant que les questions ne deviennent pas coercitives. Selon Stephen J. Schulhofer, professeur de droit à l'Université de New York, mentir sur l'existence de vidéo ou d'empreintes digitales constitue une technique courante. « Même s'il n'existe pas l'ombre d'une vidéo, ils peuvent tout inventer et demander 'Comment expliquez-vous cela?' », a-t-il précisé.

M. Schulhofer a indiqué que la police pouvait avoir franchi la limite en laissant entendre que les conséquences pour M. Thomsen se limiteraient à un traitement en clinique, ce qui aurait pu susciter de faux aveux, mais il a ajouté que le contenu même de l'interrogatoire était encore flou.

Selon les procureurs, l'interrogatoire n'a pas été enregistré par la police. Lors d'une audience organisée ce mois-ci, Rachel Ferrari, l'un des procureurs en charge du dossier, a déclaré que M. Thomsen « n'avait jamais été induit en erreur ni manipulé de façon à ce qu'il en vienne à ces déclarations ».

La colère des parents face au manque d'informations officielles a conduit certaines familles à engager un avocat pour enquêter sur cette affaire. Son accusatrice, qui considère son licenciement comme une forme de représailles, a également fait appel à un avocat. L'équipe juridique de M. Thomsen a déclaré que ce dernier était victime d'une enseignante ayant souvent porté plainte contre ses collègues, et d'enquêteurs l'ayant poussé par des techniques incorrectes à avouer des fautes qu'il n'a pas commises.

M. Thomsen n'a pas été officiellement inculpé, mais les procureurs s'attellent actuellement à réunir des preuves qu'ils présenteront devant le grand jury. Les parents de l'enseignant ont dû hypothéquer leurs biens au Danemark afin de réunir les 400.000 $ requis pour la libération sous caution et faire sortir leur fils de la prison de Rikers. Ils se sont rendus à Manhattan pour être à ses côtés.

Les amis et la famille de M. Thomsen au Danemark ont levé plus de 50.000 $ afin de financer ses frais juridiques. Cette affaire a attiré l'attention des médias danois, qui ont relaté les conditions difficiles de la prison de Rikers, où M. Thomsen était incarcéré.

Dans une récente interview pour la télévision danoise, M. Thomsen a nié toutes les accusations à son encontre, en déclarant avoir toujours considéré les attouchements à caractère sexuel sur les enfants « comme la pire chose qu'un être humain puisse faire. »

Les parents de M. Thomsen ont tous deux travaillé dans le domaine de l'éducation de la petite enfance, et, à la fin de l'année, le stagiaire espère obtenir son diplôme de l'Université de Copenhague.

Il est de notoriété publique que les frais de défense juridique aux Etats-Unis sont particulièrement élevés. Ces coûts ont déjà dépassé les 600.000 Couronnes danoises (environ 80.600 €). Les frais d'hébergement, de transport et les dépenses de la vie quotidienne s'élèvent à près de 40.000 kr (environ 5.300 €) par mois.

Tout soutien financier au fonds de défense juridique peut être envoyé par:

- Virement bancaire à la Jyske Bank: numéro d'enregistrement: 5016; numéro de compte: 0001269381

- PayPal

Vous pouvez également soutenir M. Thomsen sur la page Facebook « Support the teacher student detained in New York », et/ou en signant la pétition « Free Malthe».