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Internationale de l'Education
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Turquie: L’IE déplore un nouveau report de la décision de la Cour

Publié 3 mars 2010 Mis à jour 3 mars 2010

L’IE déplore que la Cour d’Izmir ait à nouveau décidé hier de reporter au 22 juin son verdict dans l’affaire concernant 31 syndicalistes du secteur public, dont 27 enseignants. Ils sont accusés d’avoir apporté «un soutien intellectuel à des organisations illégales».

L’interdiction de se rendre à l’étranger n’a pas été levée. S’ils sont jugés coupables, chaque défendeur pourrait être condamné à une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à dix ans.

L’IE organise actuellement l’envoi d’une délégation syndicale à l’audience du 22 juin.

Les défendeurs sont soit membres du syndicat turc du secteur public, la Kamu Emekçileri Sendikalari Konfederasyonu(KESK), soit de l’organisation membre de l’IE, Egitim-Sen, et sont kurdes ou ont des liens avec la communauté kurde.

Contexte

Les syndicalistes ont été arrêtés le 28 mai de l’an dernier après des mois de surveillance de leurs téléphones personnels et de leurs messageries électroniques privées. Leurs domiciles et leurs lieux de travail ont été perquisitionnés et des ordinateurs confisqués. Les arrestations se sont déroulées très brutalement et ont provoqué des troubles psychologiques chez les membres de leurs familles, en particulier les enfants.

Le premier procès s’est déroulé les 19 et 20 novembre, soit six mois après leur arrestation.

L’IE faisait partie de la délégation syndicale internationale présente sur place et a noté plusieurs violations des droits au cours de la procédure.

Jusqu’à l’énoncé des charges le 31 juillet, les avocats de la défense n’ont absolument pas eu accès aux dossiers de leurs clients. Au cours du procès, les droits de la défense ont été respectés et le président de la Cour a lui-même procédé aux interrogatoires. Les avocats de la défense n’ont pas pu s’entretenir avec les défendeurs. Une seule gardienne était présente, alors que dix femmes étaient jugées. La durée du procès était limitée, alors que de nombreuses personnes étaient inculpées. En raison de la nature des charges retenues contre eux, les défendeurs n’auraient pas dû être menottés durant le transport entre le tribunal et le lieu de détention.

Actions de l’IE

L’IE a lancé un appel d’action urgente en juin invitant toutes les organisations membres et partenaires à réclamer la libération des syndicalistes. Au total, 153 messages électroniques ont été reçus du monde entier et des lettres ont été envoyées par des organisations membres de l’IE aux autorités turques pour protester contre ces arrestations.

En décembre 2009, le Bureau exécutif de l’IE a adopté une motion urgente sur cette affaire. Le Bureau souscrivait aux « allégations des défendeurs selon lesquelles ils étaient poursuivis en raison de leur engagement en faveur d’une éducation laïque, scientifique et publique et du droit des élèves turcs/kurdes à bénéficier d’un enseignement dans leur langue maternelle » et relevait que « Egitim-Sen et la KESK sont régulièrement menacés parce que ces organisations défendent les droits de tous les travailleurs et s’opposent aux effets de la crise financière ».

L’IE a également commandé un rapport sur « La répression politique contre les syndicalistes enseignants en Turquie : le cas d’Egitim-Sen », rédigé par Birgul Kutan et Mario Novelli.

Le rapport, qui devrait paraître à la mi-2010, replace dans son contexte la situation des syndicalistes en Turquie et, en particulier celle des syndicalistes enseignants. Il tente de comprendre pourquoi ces enseignants militants ont été arrêtés, ce qui a conduit à ces arrestations, quelle est la nature de la procédure judiciaire en cours et ce que pourrait faire le mouvement syndical international pour aider nos collègues turcs.

« En accusant des personnes d’être membre d’une organisation armée et illégale (le PKK), l’État stigmatise effectivement et ôte toute légitimité à la fois aux détenus et au mouvement syndical en général », conclut le rapport.

Récemment, une délégation internationale s’est rendue à l’ambassade de Turquie à Bruxelles pour faire part de la préoccupation du mouvement syndical international au sujet du conflit social dramatique qui frappe la société productrice de tabac TEKEL. L’IE a saisi cette occasion de remettre à l’ambassadeur de Turquie la motion urgente de son Bureau exécutif invitant les autorités à cesser d’utiliser le système judiciaire contre les syndicats.

Message de l’IE

Au nom de toutes les organisations membres, l’IE a réaffirmé sa solidarité avec les syndicalistes dans son message envoyé à Egitim-Sen et à la KESK le 1er mars :

« Nous espérons que l’audience respectera les droits des défendeurs, étant donné que nous avons observé que le procès de novembre ne répondait pas aux critères nationaux et internationaux de justice et que toutes les charges contre les 31 syndicalistes seront abandonnées ».

L’IE continuera à suivre de près l’évolution de la situation et fera rapport sur la décision judiciaire dès qu’elle aura été rendue.