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Internationale de l'Education
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L’IE aide à rebâtir l’éducation après le désastre du tsunami

Publié 1 septembre 2009 Mis à jour 1 septembre 2009

Banda Aceh, Indonésie – De jeunes filles parées de magnifiques coiffes dorées et vêtues de costumes traditionnels de brocard vert et noir lançaient des fleurs roses tout en dansant pour accueillir les visiteurs à la cérémonie de clôture du projet post-tsunami de l’Internationale de l’Education à Aceh, la région du nord de Sumatra la plus dévastée par le tsunami cataclysmique du 26 décembre 2004.

Ces enfants font partie des milliers qui bénéficient du projet de coopération au développement le plus complexe et ambitieux jamais entrepris par l’IE. Le Secrétaire général Fred van Leeuwen et Aloysius Mathews, coordinateur régional principal pour l’Asie-Pacifique, se sont rendus à Aceh 10 jours seulement après le tsunami en réponse à un appel urgent de la branche locale de l’affilié de l’IE, l’organisation syndicale Persatuan Guru Republik Indonesia (PGRI).

Les scènes de mort et de destruction dont ils ont été témoins resteront à tout jamais gravées dans leurs mémoires : des parties entières de la ville détruites, des milliers de corps flottant parmi les débris dans des eaux toxiques, y compris à l’intérieur des ruines inondées du hall d’entrée du syndicat PGRI, les visages angoissés des survivants cherchant désespérément leurs proches. « Ce sont des images que j’emporterai dans ma tombe », dit Aloysius.

« Pour moi, il est devenu immédiatement évident que nous devions fournir une aide humanitaire plus importante que d’habitude », explique Fred. « L’échelle du désastre était si importante que l’Education pour Tous n’aurait jamais pu être réalisée sans une aide substantielle de l’extérieur. »

Le bilan total des morts du tsunami a été estimé à plus de 225.000 personnes dans 11 pays, l’Indonésie et le Sri Lanka ayant été les plus durement frappés. Le désastre était si affligeant que des millions de personnes du monde entier ont ouvert leur cœur et leur portefeuille dans une énorme vague de solidarité.

L’IE a travaillé principalement avec Oxfam Novib des Pays-Bas, qui a financé intégralement la reconstruction des écoles et les travaux communautaires de réhabilitation. En tout, le programme IE-Oxfam Novib a investi près de 7 millions d’euros dans la construction de 35 écoles à Aceh et plus de 4 millions d’euros pour bâtir 8 écoles au Sri Lanka. L’OIT, la CSI et l’IBB ont également apporté leur soutien.

Au départ, certaines organisations membres étaient très sceptiques car la responsabilité de construire des écoles publiques incombe aux gouvernements et non aux syndicats. Cependant, l’IE et Oxfam Novib avaient prévu non seulement de construire des bâtiments, mais également de mettre en place une réponse holistique aux besoins physiques, psychologiques et professionnels des enseignants, des étudiants et des communautés.

« Il est vrai que nous sortions du travail habituel d’un syndicat », reconnaît Nicolás Richards, coordinateur senior pour la coopération au développement au sein de l’IE. « Mais comment soutenir les enseignants si leurs écoles ont été emportées ? S’ils n’ont pas de travail ? Ainsi nous avons posé les fondations du travail syndical des années à venir... et nous avons mis en place de nouveaux repères pour une éducation de qualité.»

Jerôme Fernandez, un enseignant syndicaliste malais, a été chargé de coordonner le projet. Il reconnaît franchement qu’à son arrivée à Aceh en mai 2005, il ne connaissait rien au domaine de la construction. « Je ne sais même pas planter un clou. » Mais il savait que l’IE exigeait du savoir-faire et une démarche éthique. Ce n’était pas facile en raison de la situation chaotique, de l’apport massif d’argent depuis l’étranger et de la corruption omniprésente.

Selon le Baromètre global de la corruption 2009 de Transparency International (TI), l’Indonésie est le septième pays le plus corrompu sur la liste des 69 pays observés. TI a observé que la reconstruction consécutive à des désastres majeurs était la porte ouverte à la corruption en raison d’une tendance à contourner les procédures habituelles afin de garantir une reconstruction rapide.

Jérôme a dû éconduire des douzaines d’entrepreneurs véreux, refuser des pots-de-vin et même fait face à des menaces. Mais l’IE a mis en place un système efficace de contrôles, afin qu’ « aucune roupie ne soit perdue », a-t-il dit.

Le programme IE-Novib comprenait la construction d’écoles antisismiques équipées de mobilier adapté aux enfants, de bibliothèques bien remplies, de matériel d’apprentissage adéquat, y compris d’ordinateurs, de bureaux et de logements pour les chefs d’établissements, et l’allocation de bourses pour les étudiants orphelins dans le besoin. En outre, il soutenait le développement professionnel par le biais de formations au nouveau programme en vue de pallier le manque d’enseignants dans certaines matières, de cours de développement des capacités pour les dirigeants syndicaux et de sessions d’assistance psychologique pour permettre aux enseignants de faire face à leur traumatisme psychologique et à celui de leurs étudiants.

Bien sûr, les séquelles physiques et psychologiques de la tragédie n’étaient jamais loin. Jérôme se souvient : « J’ai ramassé des os humains de mes propres mains sur notre terrain de construction ».

L’IE a fait appel à l’expertise de ses affiliés. Par exemple, des membres de l’Australian Education Union sont venus pour offrir une formation en gestion et direction d’établissement scolaire aux chefs des écoles, tandis que des membres du Japan Teachers Union ayant déjà été victimes de séismes sont venus partager leurs compétences et leurs connaissances en aide post-traumatique. Cette contribution s’est avérée être un élément essentiel du projet, puisqu’à Aceh comme au Sri Lanka les conflits civils aggravaient les conséquences de la catastrophe naturelle.

En trois décennies de guerre entre les séparatistes d’Aceh et l’armée indonésienne, environ 15.000 personnes ont été tuées. Toutefois, suite au tsunami, les deux parties ont décidé de se rassembler pour le bien du pays et ont signé un accord de paix en 2005. En revanche, au Sri Lanka, le conflit entre la majorité cingalaise et la minorité tamoule a continué jusqu’en 2009, empêchant l’IE de construire l’ensemble des écoles prévues.

Pourtant, avec 35 nouvelles écoles à Aceh et 8 au Sri Lanka, il ne fait aucun doute que l’IE a apporté un changement à long-terme dans les vies de milliers d’enfants, ouvrant les portes de l’apprentissage dans des lieux où l’accès à l’enseignement avait été nié.

Les membres du personnel en charge du projet s’accordent à dire que les défis principaux dans le futur seront la viabilité et l’entretien des écoles en dépit du manque de fonds alloués à l’enseignement public, ainsi que la poursuite de la construction de la capacité des syndicats à défendre des salaires et des conditions de travail décents pour les enseignants et une éducation de qualité pour les étudiants.

Sofyan Suleiman, qui dirige le service en charge de l’éducation à Banda Aceh, a remercié chaleureusement l’IE pour sa participation à la reconstruction de l’éducation dans la région dévastée. « L’approche de l’IE a été totalement différente de celle des autres organisations qui travaillaient dans le secteur de l’éducation à la suite du tsunami », a-t-il dit. « Je peux vous garantir que nous allons surveiller la situation sans relâche et maintenir le niveau des écoles. Nous allons même essayer d’encore les améliorer. »

Revenant sur le programme de travail sans précédent accompli par l’IE, Fred van Leeuwen dit : « Je suis fier du projet post-tsunami pour plusieurs raisons. Nous avons montré que les enseignants sont capables, lorsque c’est nécessaire, de construire des écoles, de former des enseignants et de prendre soin des enfants. Les enseignants ne se contentent pas de se sentir concernés – nous pouvons aussi faire la différence ! »

Par Nancy Knickerbocker.

Cet article a été publié dans Mondes de l’Éducation, No 31, septembre 2009.