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Internationale de l'Education
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Canada: La loi spéciale 78 du Québec porte atteinte aux droits des étudiant(e)s et aux libertés civiles

Publié 21 mai 2012 Mis à jour 25 mai 2012

Les affiliés de l'IE au Québec/Canada, la Confédération des syndicats du Québec (CSQ), la Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec (FNEEQ-CSN), et la Canadian Association of University Teachers (CAUT) ont sévèrement condamné la loi 78. Ce projet de loi, présenté pour mettre fin à la grève étudiante de 14 semaines, enfreint les libertés fondamentales d'association et d'expression.

Adoptée le 18 mai dernier, la loi 78 interdit aux groupes de plus de 50 personnes de participer à des rassemblements pacifiques sans l'approbation antérieure des autorités, ce qui constitue une violation directe de la liberté fondamentale d'association garantie par la Charte canadienne des droits et libertés. Cette loi autorise le gouvernement à ne plus octroyer de fonds aux associations étudiantes, impose de lourdes amendes aux manifestant(e)s, et force les employé(e)s qui soutiennent la grève étudiante à reprendre le travail. Elle vise en particulier les dirigeants des associations étudiantes qui peuvent recevoir des amendes individuelles allant jusqu'à CAN$ 35.000 s'ils continuent à manifester en dépit de la loi. La participation à une deuxième manifestation double l'amende. Pour une association étudiante soutenant une manifestation, l'amende initiale va jusqu'à CAN$ 125.000 et est doublée en cas de récidive.

La nouvelle loi modifie la législation en vigueur pour les actions collectives en justice, et permet de poursuivre plus facilement des associations étudiantes et autres. Elle renverse également le fardeau de la preuve, tenant les associations étudiantes, les associations de facultés et les syndicats responsables de tout dommage causé par des tiers, lors d'une manifestation, à moins qu'ils puissent prouver que les dommages ne soient pas liés à la manifestation.

De même, la loi érige en infraction les expressions de soutien à des manifestations, exposant les citoyen(ne)s à des amendes individuelles allant jusqu'à CAN$ 5.000, les représentant(e)s d'organisations à des amendes de CAN$ 35.000 et leurs organisations à des amendes de CAN$ 125.000.

La loi a déjà été vivement critiquée par l'Association du Barreau du Québec, les groupes d'étudiants, les organisations syndicales et les groupes de défense des libertés civiles.

La CSQ a déclaré que cette loi minait bien plus que le droit de grève des étudiant(e)s québécois(es), qui s'opposent depuis plus d'un an à l'augmentation de 82% des droits de scolarité.

D'autres syndicats soutiennent également que le gouvernement s'attaque directement à la liberté d'association des étudiant(e)s, ainsi qu'à la liberté d'expression de tous/toutes les citoyen(ne)s canadien(ne)s. Etant donné que cette loi va bien au-delà du cadre d'une grève étudiante et enfreint les libertés civiles de tous/toutes les Canadien(ne)s, la CSQ appelle tous/toutes les citoyen(ne)s concerné(e)s et les militant(e)s de l'éducation à soutenir les étudiant(e)s dans leur action en justice en vue d'abroger la loi 78, en signant la pétition disponible sur http://www.loi78.com.

« Cette loi est abjecte et on assiste à la constitution d'un vaste mouvement social en faveur de la défense des droits collectifs et démocratiques, incluant le droits à l’éducation », a souligné le Président de la FNEEQ, Jean Trudelle.

Il a poursuivi: « Il faut reconnaître aux étudiants le mérite d'avoir forcé un débat public sur le droit à l'éducation et d'avoir rallié à leur cause une grande partie de la population. »

« Cette loi spéciale est un acte terrible de répression massive », a dit le Directeur général de la CAUT, James L. Turk. « Le gouvernement du Québec a choisi d'utiliser un instrument législatif pesant comme arme pour museler l'opposition. »

« Maintenant, plus que jamais, le reste du Canada doit arborer le carré rouge pour exprimer son soutien aux étudiant(e)s du Québec et aux libertés civiles », a ajouté Turk, en se référant au symbole de la grève étudiante. « La loi 78 doit être abrogée au nom de la démocratie ou le reste du Canada devra descendre dans la rue aux côtés des étudiants. »

L'affilié français de l'IE, UNSA-Education, a exprimé sa solidarité internationale avec les étudiant(e)s et les syndicats de l'éducation du Québec.

Un autre affilié français de l'IE, la FNEC-FP-FO, a également publié un communiqué soutenant les étudiant(e)s et demandant le retrait de la Loi 78.

Le Secrétaire général d'UNSA-Education, Laurent Escure, a déclaré que son syndicat « condamne la propension, dans un certain nombre de pays développés, à « marchandiser » de façon inquiétante l'accès à l'Université en accentuant la discrimination par l'argent au détriment des impératifs de justice sociale, mais aussi d'élévation indispensable des niveaux de qualification. »

La grève continue de plus de 165.000 étudiant(e)s concernant les plans d'augmentation des droits de scolarité universitaire a déjà conduit le 14 mai dernier à la démission de la Ministre de l'Education du Québec, Line Beauchamp.

« Je n'abandonne pas face au vandalisme et à la désobéissance civile », a-t-elle dit. « Je démissionne parce que je ne crois plus faire partie de la solution. Je ne serais jamais parvenue à un compromis avec les étudiants », a-t-elle déclaré. « C'est le plus important compromis que je puisse faire. »

A la suite de sa démission, les dirigeants des mouvements d'étudiants ont réaffirmé que le problème pour eux n'avait jamais été Beauchamp, mais la hausse des droits de scolarité. Changer la Ministre ne changera pas nécessairement cela. Ils ont déploré que le Premier Ministre n'ait pas laissé une assez grande marge de manœuvre à la Ministre de l'Education pour résoudre le conflit. Ils ont également nié que les groupes d'étudiants n'étaient pas prêts à faire de compromis sur la question de l'augmentation des droits de scolarité.

Les étudiant(e)s québécois(es) manifestent toujours contre la hausse des droits de scolarité. Près de 200 étudiant(e)s ont été arrêté(e)s au cours de la dernière manifestation à Montréal, le 20 mai.

L'IE soutient ses affiliés canadiens dans leur lutte pour le respect des droits des étudiant(e)s, et exhorte les autorités québécoises d'abroger la loi 78 et d'entamer un dialogue loyal avec les associations étudiantes et les syndicats de l'éducation.

Vidéo présentant une manifestation étudiante contre la Loi 78: