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Photo by Mufid Majnun on Unsplash
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Les organisations régionales des FSI pour l’Asie-Pacifique demandent la fin de l’«apartheid vaccinal»

Publié 26 novembre 2021 Mis à jour 3 décembre 2021

Mise à jour – 29 novembre 2021 – La 12e Conférence ministérielle (CM12) de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) devait avoir lieu du 30 novembre au 3 décembre 2021 à Genève, en Suisse. Cependant, en raison de la nouvelle variante Omicron du virus COVID-19, il a été décidé le 26 novembre de reporter la conférence ministérielle. Malgré le report de la MC12, il est confirmé que les activités prévues pour le 30 novembre visant à soutenir la dérogation concernant les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC), se poursuivent, car la nouvelle variante rend le besoin de dérogation ADPIC encore plus urgent.

Les branches régionales des fédérations syndicales internationales (FSI) en Asie-Pacifique ont appelé à soutenir la campagne de dérogation aux ADPIC, afin de mettre fin à l’« apartheid vaccinal » qui sévit dans la région.

Les organisations régionales de l’Internationale de l’Éducation (IE), de l’Internationale des services publics (ISP), de la Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF Global), de l’Internationale des travailleurs du bâtiment et du bois (IBB), de l’Union internationale des travailleurs de l’alimentation, de l’agriculture, de l’hôtellerie-restauration, du tabac et des branches connexes (UITA) et d’UNI Global Union ont reconnu que le financement public a ouvert la voie aux progrès scientifiques dans la lutte contre le coronavirus. Elles ont cependant souligné que « les règles commerciales protégeant les intérêts des entreprises menacent à présent l’accès aux médicaments et aux équipements vitaux, mettant ainsi la vie de millions de personnes en danger ».

C’est la raison pour laquelle de nombreux gouvernements de par le monde – soutenus par les syndicats et la société civile – en appellent à la Conférence ministérielle de l’OMC pour qu’elle déroge aux mesures de protection de la propriété intellectuelle pour les vaccins, les médicaments et les fournitures médicales intervenant dans la lutte contre la COVID-19.

Certains pays continuent de bloquer la dérogation aux ADPIC

Les organisations régionales des FSI ont par ailleurs souligné que, sous la pression d’une large alliance de syndicats et de la société civile, les pays faisant obstacle à la dérogation devraient revoir leur position et accepter de s’asseoir à la table des négociations. Malgré cela, une partie d’entre eux, comme le Royaume-Uni, la Suisse et l’Union européenne, continue de nier la nécessité de la dérogation aux ADPIC telle que proposée par l’Inde et l’Afrique du Sud.

Soulignant que la Conférence ministérielle de l’OMC débutera le 30 novembre sans texte de négociation officiel sur la dérogation aux ADPIC, les organisations régionales des FSI pour l’Asie-Pacifique ont insisté que « nous devons continuer à exhorter tous les pays, en particulier l’UE, le Royaume-Uni et la Suisse, à soutenir la dérogation aux ADPIC. Grâce à notre action et à nos pressions, nous pouvons y arriver. Notre campagne doit se poursuivre jusqu’à ce que tout le monde, partout, ait accès aux traitements et aux vaccins qui sauvent des vies. »

Action syndicale régionale le 30 novembre

Les FSI appellent les syndicats et les militants de la région à se joindre à l’action du 30 novembre en :

  • Menant des actions sur Twitter : envoyez un Tweet aux gouvernements ciblés des pays qui font obstacle à la proposition de dérogation aux ADPIC; utilisez les hashtags clés : #TRIPSwaiver et #MC12.
  • Publiant une photo sur les réseaux sociaux accompagnée d’un message avec le hashtag #TRIPSWaiver. Taguez @PSIAsiaPacific @eduintAP @ITFAPAC @iufap @uniapro @BWIglobal sur Twitter et Facebook.
  • Adressant une lettre à la Commission européenne et aux gouvernements britannique, suisse et allemand, attirant leur attention sur le fait que les bénéfices privés ne doivent pas passer avant la santé publique. Un modèle de lettre peut être téléchargé ici (en anglais).
  • Présentant la lettre au(x) consulat(s) ou ambassade(s) locaux des pays concernés et
  • Photographiant les membres du syndicat lors de leurs actions.

Pressions de la société civile en faveur du report de la 12e Conférence ministérielle de l’OMC et d’un accord sur une dérogation en matière de propriété intellectuelle

Le 23 novembre, plus de 130 organisations de la société civile (OSC) mondiales, régionales et nationales ont écrit aux membres de l’OMC pour leur demander instamment de reporter la 12e Conférence ministérielle (CM12) qui doit se tenir à Genève, Suisse, du 30 novembre au 3 décembre 2021, en pleine pandémie mondiale, à l’heure même où le nombre de cas augmente dans le monde entier et atteint des pics au cœur de l’Europe, où se tient la conférence ministérielle. Les OSC estiment, par ailleurs, que la COVID-19 a mis en exergue le fait que l’OMC donne systématiquement la priorité aux profits sur les personnes, et ce par le truchement des monopoles garantis à Big Pharma dans le cadre des ADPIC.

L’OMC a totalement échoué à résoudre l’apartheid vaccinal qui est une conséquence directe de son Accord sur les ADPIC et des monopoles que celui-ci confère aux multinationales pharmaceutiques, lesquelles ont bénéficié de subventions publiques massives. La dérogation aux ADPIC pendant la pandémie de COVID-19 aurait pu être approuvée par le Conseil général de l’OMC à Genève, qui a déjà approuvé de nombreuses autres dérogations. Cette proposition n’a pourtant toujours pas été approuvée un an après avoir été présentée.

Les OSC ont conclu en indiquant que « depuis des années, l’OMC se voit confrontée à une crise de légitimité du fait de son incapacité à remédier à l’instabilité, aux inégalités et à l’endettement systémiques des pays les plus pauvres, des travailleurs, des femmes, des populations autochtones et des communautés vulnérables, et de son rôle dans l’aggravation de ces problèmes. La pandémie de COVID-19 a mis à nu ces fractures profondes entre le Nord et le Sud, les riches et les pauvres, les privilégiés et les vulnérables. »

L’Internationale de l’Éducation a salué l’adoption par le Parlement européen d’une résolution appelant la Commission européenne à soutenir la dérogation aux ADPIC lors de la Conférence ministérielle de l’OMC.

Les syndicats de l’éducation pour l’équité vaccinale

Dès le début de la crise sanitaire, les syndicats de l’éducation se sont mobilisés pour l’équité vaccinale, soulignant que « personne n’est en sécurité tant que tout le monde ne l’est pas », et que l’accès aux vaccins COVID-19 pour les enseignant·e·s et les personnels de soutien à l’éducation est essentiel pour un retour sûr et permanent aux cours présentiels.

Les syndicats du secteur insistent sur le fait que la première condition pour que les éducateur·trice·s soient vacciné·e·s partout dans le monde est de garantir un approvisionnement suffisant en vaccins dans tous les pays. L’apparition récente d’un nouveau variant de la COVID présentant un « nombre extrêmement élevé » de mutations susceptibles d’entraîner de nouvelles vagues de propagation de la maladie en échappant aux défenses de l’organisme, vient souligner la nécessité d’une équité en matière vaccinale, outre le fait que la Conférence ministérielle de l’OMC doit inclure un accord sur la dérogation aux ADPIC si l’on ne veut pas qu’elle marque un nouvel échec dans les annales des Conférences ministérielles de l’OMC.

Comme l’a démontré un récent avis juridique, les États parties au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC) ne devraient pas s’opposer à la dérogation s’ils veulent se conformer à leurs obligations en matière de droits humains.