Tchad : le syndicat au cœur des négociations pour l’amélioration du statut de la profession enseignante
Après des années de négociations, le Syndicat des enseignants du Tchad (SET) a obtenu la révision du décret encadrant le statut de la profession enseignante. Un premier pas qui relance l’espoir d’une amélioration des conditions de travail et ouvre une nouvelle phase de négociations, mais laisse encore de nombreux défis à relever.
Un syndicat en première ligne face à l’immobilisme
« Le bureau exécutif national du SET avait engagé une négociation depuis 2023 avec le gouvernement par rapport au statut particulier des enseignants. C'est un statut qui n'est pas totalement appliqué et dont les premières moutures sont même devenues obsolètes », explique Bolmbari Ngolaou, secrétaire général du SET. Le 6e congrès du SET a permis de relancer les discussions, suspendues depuis plusieurs mois. Mais la reprise n’a pas été aisée : « Il a fallu menacer par un préavis de grève et même une grève effective de trois jours, lancée par le bureau national du SET», indique M. Ngolaou.
Un mouvement syndical fédérateur
Si le SET a été à l’initiative des négociations, il n’a pas été seul à porter la voix de la profession enseignante, ajoute-t-il : « De nombreux syndicats sont créés dans le secteur de l'éducation. Mais au départ, c'est le SET qui a engagé ces négociations autour de la révision du décret 477 de 1992. Mais certains syndicats de l'éducation sont venus se greffer sur nos revendications. » Cette capacité à fédérer a permis au mouvement de prendre de l’ampleur, jusqu’à entraîner la fermeture de toutes les écoles, publiques comme privées, lors d’une grève nationale de trois jours.

Le combat syndical loin d’être terminé
Le 6 novembre 2025, un décret révisé a enfin vu le jour, fruit de longues négociations et d’une mobilisation sans faille.
Le communiqué du bureau exécutif national du SET, daté du 10 novembre 2025, souligne la portée de cette avancée tout en appelant à la vigilance : « Ce décret définit le cadre relatif au statut des enseignants et enseignantes. C'est donc une première étape. Maintenant, il faut voir concrètement ce que le gouvernement va faire, parce que dans le décret, il est question de certains avantages, notamment des primes et des indemnités. Il faut qu'on passe à la phase de chiffrage, et nous sommes en ce moment sur ça. »
Le communiqué du SET continue en indiquant que « le Bureau exécutif national exhorte par ailleurs les militantes et militants à rester solidaires, déterminés et unis pour mener les actions prochaines en vue de traduire en acte le décret 2850 du 6 novembre 2025. »
Entre espoirs et incertitudes économiques
Si le gouvernement invoque toujours la fragilité de la situation financière du pays, la profession enseignante, elle, pointe les ressources issues de l’or et de l’antimoine. Le dirigeant du SET note que « les enseignants et enseignantes se disent que, du moment qu’il y a des recettes publiques chiffrées à des milliards, il faut quand même améliorer les conditions de vie des travailleurs et travailleuses. Les enseignants et enseignantes sont convaincus que le gouvernement a la possibilité de revoir les salaires à travers certaines indemnités et primes. »

Un syndicalisme ouvert sur l’international
Le SET s’inscrit également dans une dynamique internationale, en lien avec la campagne de l’Internationale de l’Éducation, « La force du public : ensemble on fait école ! », pour un financement public accru de l’éducation, qui devrait être prochainement lancée dans le pays. Cette campagne constitue un appel urgent aux gouvernements pour qu'ils investissent dans l’enseignement public, un droit humain fondamental et un bien public, et qu'ils investissent davantage dans les enseignant·e·s, le facteur le plus important pour parvenir à une éducation de qualité.
La révision du décret sur le statut des enseignantes marque une étape importante pour le syndicalisme enseignant au Tchad. Mais, comme le rappelle M. Ngolaou, « il n’y a pas lieu de se réjouir outre mesure » : la mobilisation syndicale reste plus que jamais nécessaire pour que les promesses se traduisent en actes et que les conditions de vie des enseignant∙e∙s s’améliorent durablement. La vigilance et l’unité syndicale seront donc déterminantes pour transformer ce cadre juridique en avancées concrètes.