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Internationale de l'Education
Internationale de l'Education

Les italiens s’opposent au démantèlement de l’éducation publique

Publié 16 janvier 2009 Mis à jour 16 janvier 2009

Des enseignants, parents et élèves dans toute l’Italie se rallient pour défendre l’éducation publique de qualité et protestent contre l’ensemble de réformes dévastateur proposé par le gouvernement de Silvio Berlusconi. Les dirigeants syndicaux annoncent un retour vers le modèle éducatif d’il y a 30 ans.

L’Internationale de l’Education et le Comité syndical européen de l’éducation expriment leur soutien total à l’appel lancé par les organisations membres en Italie – Federazione Lavoratori della Connoscenza (FLC-CGIL), CISL-Scuola et UIL-Scuola – pour mener des actions contre les mesures du gouvernement visant à réduire les effectifs dans le secteur de l’éducation de façon drastique.

Dans le cadre des mesures qui visent à renflouer les caisses du gouvernement en réduisant les dépenses publiques et en augmentant l’impôt sur les revenus, le Premier Ministre Silvio Berlusconi prévoit, à partir de 2009, de se débarrasser des enseignants dans la plupart des branches spécialisées et de ne placer dans les écoles primaires qu’un seul enseignant à la tête de deux classes réunies chacune en une seule. La réforme prévoit également de réduire la semaine scolaire de moitié environ, ce qui constitue un sérieux handicap pour les parents travailleurs des 2,8 millions d’enfants âgés de 6 à 10 ans.

Le retour à un modèle d’enseignement révolu

Dans l’hypothèse où cette réforme serait adoptée en tant que loi, tout le secteur de l’éducation en Italie se verrait contraint de remettre en application un modèle d’enseignement abandonné il y a 30 ans. Si l’on en croit la Ministre de l’Education Mariastella Gelmini, cette réforme permettra peut-être au pays le plus endetté d’Europe de réaliser une économie de 8 milliards d’euros.

Les enseignants estiment, au contraire, que cette réforme compromet fortement l’avenir des générations futures. Joëlle Casa, la Secrétaire générale du FLC-CGIL, précise qu’au moins 140 000 emplois seront supprimés, parmi lesquels 80 000 postes d’enseignants. Ces mesures conduiraient à la suppression des programmes d’appui destinés aux élèves présentant des difficultés, à une augmentation importante du nombre d’élèves par classe et à la fermeture de plusieurs écoles, entraînant pour certains enfants des distances plus longues à parcourir.

La réforme n’affectera pas uniquement les écoles primaires et secondaires. Elle prévoit également la suppression d’un tiers des ressources allouées actuellement aux universités publiques, ainsi qu’une diminution de 10% au moins de leurs équipes de chercheurs.

La voix des enseignants s’élève pour protester

Afin d’exprimer leur mécontentement à l’encontre de ces mesures, débattues actuellement au Parlement, les enseignants se sont vêtus de noir pour accueillir leurs élèves lors de la rentrée scolaire du 15 septembre. Le 2 octobre dernier, une manifestation nocturne a été organisée dans 25 écoles primaires de Rome. En dépit de ces contestations, aucun signe de la part du gouvernement ne semble indiquer une remise en question de la réforme, ni même une volonté d’entamer le dialogue avec les enseignants.

Un avenir difficile pour les enseignants, les élèves et les parents

Selon Joëlle Casa du FLC-CGIL, « il est insensé de croire que les enseignants pourront assumer une double charge de travail avec seulement la moitié des ressources. En particulier, lorsque l’on sait que le nombre d’élèves par classe est déjà en augmentation et que les enseignants de l’Italie toute entière se retrouvent confrontés à des difficultés dues à la charge de travail, notamment le nombre croissant des cours à donner ou l’attention particulière que requièrent les enfants pour lesquels l’italien n’est pas la langue maternelle ». Actuellement, chaque classe compte trois enseignants chargés de dispenser les cours, et l’école ouvre ses portes de 8 h 30 à 16 h 00. A partir de 2009, il ne subsistera plus qu’un seul enseignant par classe, chargé de donner cours 24 h par semaine - un horaire similaire à celui qui était en application il y a trois décennies – et les cours seront suspendus à 12 h 30.

Les parents qui travaillent se retrouveront face à de réelles difficultés pour organiser leur vie et s’occuper de leurs enfants. Outre la nécessité de devoir trouver des crèches pour leurs enfants, rares et onéreuses en Italie, les mères travailleuses n’auront plus la possibilité d’exercer un emploi à temps partiel conformément à la loi, comme c’est le cas actuellement, mais seront tributaires de la décision de leurs employeurs. D’autres mesures, telles que l’application de conditions plus strictes concernant l’octroi des congés de maladie ou des congés parentaux, viennent s’ajouter aux difficultés auxquelles seront confrontés les parents travailleurs. L’Italie en queue de peloton pour le financement de l’enseignement

D’après la récente publication de l’Organisation de coopération et de développement économiques, Regards sur l’éducation 2008, en ce qui concerne l’enseignement public financé par le budget de l’Etat, l’Italie se classe en toute dernière position, derrière la République tchèque : moins de 10 % de l’ensemble de ses dépenses publiques en 2006. Par ailleurs, elle occupe également la 23e position en matière de salaires des enseignants, juste derrière la Slovénie : un enseignant dans une école primaire gagne en moyenne 21 257 euros par an.

Cet article a été publié dans Mondes de l'Éducation, No. 28, décembre 2008.