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Mondes de l'éducation

L’enseignement supérieur en butte aux attaques

Publié 8 mai 2025 Mis à jour 8 mai 2025
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Dans une véritable déclaration de guerre aux universités et établissements d’enseignement supérieur américains, le président Donald Trump a exigé d’eux qu’ils se plient à ses exigences en matière de curriculum, mais aussi de critères d’admission et d’embauche. Autocratiques autant qu’illégaux, les agissements de Trump s’apparentent à une guerre contre le savoir dont le but n’est rien moins que de forcer les institutions académiques à s’incliner devant son idéologie et d’éroder la liberté d’expression et la recherche universitaire.

Trump affirme que son offensive contre l’enseignement supérieur est avant tout une réponse à l’antisémitisme qui règne sur les campus. L’antisémitisme, certes, précède les actes odieux commis par le Hamas le 7 octobre 2023 et la guerre qui s’en est suivie, et n’a fait que s’accroître depuis. La lutte contre l’antisémitisme sur les campus est une nécessité, tout comme la sécurité des étudiantes et des étudiants, de confession juive ou autre. Mais Trump instrumentalise les enquêtes sur l’antisémitisme pour réduire les groupes défavorisés au silence et attiser les guerres culturelles, la méfiance et les dissensions, autant que pour saper l’enseignement supérieur, rempart de la démocratie et moteur de notre économie. Une pratique inadmissible, antidémocratique et anticonstitutionnelle. L’administration américaine se sert des personnes juives comme prétexte pour se débarrasser d’étudiantes et d’étudiants qui sont ici en toute légalité. Les fonctionnaires de l’immigration arrêtent et tentent d’expulser des étudiantes et des étudiants qui n’ont commis aucun crime, au mépris du droit à un procès équitable, un fondement de la démocratie américaine.

Tout cela aidera peut-être Trump à atteindre son objectif de diviser la société américaine, mais cela ne fera pas de nos campus des lieux plus sûrs pour les étudiantes et les étudiants de confession juive ni ne répondra aux véritables problèmes liés à l’antisémitisme. C’est l’une des raisons pour lesquelles un groupe d’organisations juives a publié une déclaration affirmant que les agissements de Trump compromettaient la sécurité des étudiantes et des étudiants de confession juive et de l’ensemble de la communauté juive.

Trump a lancé des enquêtes contre des dizaines d’universités et établissements, privant ceux-ci de milliards de dollars de subventions à la recherche. L’administration a formulé des exigences qui vont de la surveillance directe des programmes universitaires – voire, dans le cas de l’Université de Columbia, de l’ensemble de l’institution – à l’imposition de politiques disciplinaires, ou encore au contrôle des décisions d’embauche. Elle cible les étudiantes et les étudiants qui exercent les droits qui leur sont garantis par le Premier amendement et révoque les visas de professeur·es et membres du personnel. L’administration entend ainsi remodeler l’enseignement supérieur américain à son image en recourant à la force brute.

La liberté au service de la connaissance, la liberté d’expression et la liberté de parole sont des droits américains fondamentaux. Ils constituent la base d’une démocratie saine. Les écoles publiques, les universités et les colleges américains favorisent la quête du savoir et la liberté d’expression, aidant les étudiantes et les étudiants à devenir des citoyens et des citoyennes engagé·es. Ce sont des creusets d’idées qui encouragent le débat franc et ouvert ainsi que la différence d’opinion, une tâche dont ils ne peuvent s’acquitter qu’au bénéfice d’une totale indépendance face au contrôle ou à la coercition des autorités. Lorsqu’un gouvernement exerce une mainmise sur l’enseignement, la pensée ou le discours, c’est la démocratie elle-même qui est en danger.

La libre quête du savoir favorise l’émancipation des Américaines et des Américains.

La suppression du financement pour la recherche et l’innovation en vue de s’assurer le respect porte atteinte à la compétitivité de l’Amérique et aide nos adversaires à prendre le pas sur nous, notamment sur le plan technologique. Les centres d’innovation et de recherche des universités américaines font depuis longtemps l’envie du monde entier. Par le biais de ses agences et programmes de subvention, le gouvernement fédéral est un moteur et un soutien fondamental de la recherche dans des domaines aussi variés que la santé, la science, la technologie, etc. Les États-Unis sont le leader mondial dans le domaine de la recherche – une recherche dont le secteur privé ne peut pas et ne veut pas se charger seul et qui conduit à des découvertes, des innovations, des remèdes et des avancées qui profitent au bien commun et contribuent au progrès de notre société. Piliers des communautés locales, les colleges et universités soutiennent également l’emploi et les petites entreprises. Espaces de rassemblement communautaire, ils contribuent à la croissance des secteurs en lien avec la recherche et l’innovation académiques.

Cette guerre contre le savoir et la libre expression doit être combattue devant les tribunaux, dans la rue ainsi que par nos établissements et universités.

Principal syndicat de l’enseignement supérieur, la Fédération américaine des enseignants (AFT) s’est associée aux poursuites engagées par notre affilié, l’American Association of University Professors, contre l’administration Trump au nom de nos membres, qu’elle accuse d’avoir illégalement supprimé des millions de dollars de financement fédéral pour la recherche en santé publique à l’Université de Columbia.

L’Université de Harvard a rejeté avec véhémence les demandes illégales et sans précédent de Trump visant à la placer sous le contrôle du gouvernement. « Aucun gouvernement… n’a le droit de dicter à des universités privées ce qu’elles peuvent enseigner, qui elles peuvent admettre et embaucher, ou encore quels domaines d’études et de recherche elles peuvent poursuivre », a écrit son président.

Les Américaines et les Américains sont également descendu·es dans la rue pour s’opposer à cette guerre contre le savoir et les libertés. Les attaques contre l’enseignement supérieur ont ainsi été au cœur des manifestations « Hands Off » qui se sont tenues le 5 avril dernier et ont mobilisé des dizaines de milliers de personnes à travers le pays contre le programme chaotique et cruel de Trump.

La libre quête et la disponibilité du savoir favorisent l’émancipation des Américaines et des Américains, renforcent notre économie et notre démocratie, et constituent un vecteur d’opportunité. C’est pourquoi nous devons tous nous insurger face à cette guerre contre le savoir.

Le contenu et les avis exprimés dans ce blog sont ceux de son auteur et ne reflètent pas nécessairement la position officielle de l’Internationale de l’Education.