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Philippines: le syndicalisme, ce n’est pas du terrorisme

Publié 23 novembre 2020 Mis à jour 30 novembre 2020

Dans le cadre d’un webinaire du Conseil des Global Unions (CGU) sur la quête de justice, qui s’est tenu le 23 novembre dernier, des dirigeant∙e∙s syndicaux∙ales et autres dirigeant∙e∙s, ainsi que des activistes des Philippines ont rapporté des faits de répression aux Philippines. Des récits saisissants ont été relatés au sujet d’assassinats, de menaces et d’intimidation, d’étiquetage comme « rouge » et d’abus commis par la police dans les secteurs privés et publics.

Depuis l’arrivée du président Duterte, qualifier une personne de terroriste, notamment en l’étiquetant de « rouge », fait partie de la stratégie d’écrasement de toute activité indépendante et dissidente. Il n’est pas toujours possible de relier les sources de telles menaces au gouvernement. Cependant, les participant∙e∙s semblaient s’accorder sur la plausibilité de l’existence de tels liens.  Ainsi, un avis de recherche à l’encontre d’une figure de l’opposition pour « recrutement de terroristes » a été dévoilé, mais son origine n’a pas été identifiée. La Loi antiterroriste adoptée en juillet 2020 permettra aux autorités de maintenir des personnes en détention sans chef d’accusation pendant des périodes prolongées, et augmentera les arrestations arbitraires et autres abus juridiques.

De nombreuses fausses accusations appuyées par des « preuves » déposées par la police, souvent des armes ou des explosifs, ont été rapportées. Les accusations de terrorisme servent depuis longtemps à criminaliser et annihiler l’activité syndicale et autre activité indépendante. La description d’une importante opération de police a révélé que cinquante travailleur∙euse∙s avaient été arrêté∙e∙s en un seule journée sur la base de fausses accusations reposant sur des preuves ajoutées.

De graves violations ont été rapportées à Mindanao où la loi martiale a été déclarée. La raison invoquée pour son application était la nécessité de combattre les terroristes Maoïstes. Or, les attaques se sont portées sur des syndicalistes et autres personnes n’ayant aucun lien avec des groupes terroristes. En d’autres termes, il s’agissait d’un prétexte largement répandu pour justifier la répression.

Manuel Bompard, membre français du Parlement européen, a pris la parole lors du webinaire. Bompard, qui appartient au parti de la « France insoumise », est également membre du Groupe de la gauche unitaire européenne– Gauche verte nordique au Parlement européen. Il a souligné qu’une résolution sur les violations des droits humains et syndicaux aux Philippines avait reçu un large soutien de la part de groupes parlementaires et qu’elle avait été adoptée avec une écrasante majorité. Elle appelait à une révision des préférences commerciales de l’Union européenne (UE) pour les Philippines, dans le cadre du programme SGP+.

Sue Longley, Secrétaire générale de l’Union internationale des travailleur∙euse∙s de l’alimentation et le Secrétaire général de l’Internationale de l’Éducation, David Edwards, se sont exprimés au nom du Conseil des Global Unions. Sharan Burrow, Secrétaire générale de la Confédération syndicale internationale, a également partagé un message de soutien.

Longley a mis en relief l’importance de l’unité affichée par le mouvement syndical aux Philippines au regard des questions fondamentales sur les droits humains et syndicaux. Elle a assuré que le solide soutien syndical à l’échelon mondial perdurerait et que l’accent serait mis sur des actions pratiques et concrètes, notamment des interventions organisées et coordonnées avec l’Organisation internationale du Travail et d’autres instances des Nations Unies, et avec l’UE.

Edwards a également évoqué l’interdépendance des initiatives nationales et internationales, et il a assuré que les Global Unions cordonneraient leur travail, en vue de mener des actions cohérentes et efficaces à l’échelon mondial, y compris avec les instances internationales. En référence à l’action du Parlement européen, il a soulevé l’importance de la pression économique, notamment à travers les conditions de l’UE relatives au SGP+. Et de préciser que la solidarité mondiale envers les Philippines bénéficiait du soutien assuré de la Confédération européenne des syndicats.

Des syndicats de toutes les régions seront sollicités pour contacter les ambassades des Philippines et pour initier d’autres actions de solidarité, dans le cadre de la Journée mondiale d’action pour les Philippines qui aura lieu le 30 novembre prochain.