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Centrafrique: le conflit, un obstacle parmi d’autres pour les enseignant(e)s

Publié 12 mars 2018 Mis à jour 12 mars 2018

Malgré le conflit qui ravage la République centrafricaine, les enseignant(e)s ne ménagent pas leurs efforts pour continuer à assurer le fonctionnement du système éducatif et faire respecter leurs droits syndicaux.

En dépit du conflit continu, le système scolaire fonctionne, de manière générale. Néanmoins, il est mis à mal par les problèmes spécifiques qui minent le pays, souligne le Secrétaire général du Syndicat National des Enseignants Autonomes de Centrafrique (SYNEAC) Etienne Paulin Songoli.

Insécurité régionale

Pour Songoli, le plus gros problème actuel dans les régions conflictuelles reste l’insécurité persistante. Ce qui amène les enseignant(e)s affecté(e)s dans ces régions troublées restent à la capitale Bangui, car ils craignent pour leurs vies. C’est pourquoi les examens scolaires, à savoir le baccalauréat et le brevet des collèges, n’ont pas été organisés dans ces régions. Le baccalauréat a été organisé tardivement à Bangui pour les étudiant(e)s ayant fui leurs régions pour résider dans la capitale.

Pénurie d’enseignant(e)s

Un autre problème sérieux pour le système éducatif est la grande pénurie d’enseignant(e)s, surtout au fondamental. Ceci a un effet dramatique au niveau de ratio enseignant(e)s/étudiant(e)s, avec des effectifs allant jusqu’à 250 étudiant(e)s par classe, fait noter Songoli. Egalement, les autorités ont voulu compenser le départ massif d’enseignant(e)s chevronné(e)s expérimenté(e)s en les remplaçant par des ‘maîtres(esses) d'enseignement’ « ayant reçu une formation au rabais, soit six mois, et les professeur(e)s vacataires, dont la plupart sont dépourvu(e)s de connaissances pédagogiques ».

Arriérés de salaire

Si les salaires des enseignant(e)s sont maintenant payé(e)s régulièrement, des arriérés de salaire demeurent. Selon un accord entre syndicats/ministère de l’Education/Banque mondiale de septembre 2017, il était prévu de rattraper les arriérés de 33 mois des anciens régimes des présidents Kolingba et Patasse. Le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale ont pris l'engagement de payer à partir de janvier 2018. Ces arriérés, dont le coût avoisine les 70 milliards de francs CFA (environ 107 millions d’euros), n’ont toutefois toujours pas été versés.

Formation

Songoli explique par ailleurs qu’il existe un problème de formation syndicale des enseignant(e)s. Pourtant, organiser des réunions, prendre la parole, etc., la demande de formation est importante.

Le SYNEAC a aussi organisé des réunions pour encourager les enseignant(e)s à payer leurs cotisations. Songoli note également que, si une plate-forme syndicale se réunit régulièrement avec le gouvernement pour dialoguer, les thèmes abordés ne sont pas spécifiques à l’éducation, car la centrale syndicale du SYNEAC n’en fait pas encore partie.

Concernant la formation professionnelle des enseignant(e)s, Songoli déplore qu’il n’y ait qu’une seule école normale d'instituteurs/trices à Bambari. Cet établissement fournit difficilement cent enseignant(e)s par an, insiste-t-il. Toutefois, ils/elles ne sont pas d’emplois garantis faute de budget, alors que le pays a besoin de plus de 5.000 enseignant(e)s du primaire. Le nombre d'étudiant(e)s scolarisables dépasse malheureusement celui des étudiant(e)s scolarisé(e)s, parce que le Gouvernement ne peut résoudre ce problème pour des raisons financières. Ce faisant, les écoles privé(e)s poussent comme de champignons, favorisant ainsi la marchandisation de l’éducation.

Privatisation

Songoli explique que, selon lui, l’Etat n’ayant pas pu prendre en charge la construction de toutes les écoles nécessaires, ni former tou(te)s les enseignant(e)s nécessaires, cela a ouvert un « marché » pour ouvrir des écoles privées. Cette tendance à la privatisation se retrouve au sein du ministère de l’Education lui-même, où l’on trouve un directeur des établissements privés, détaille-t-il. Si les étudiant(e)s trouvent au moins une offre éducative dans le privé à défaut du public, la qualité de l’enseignement dans les écoles privées pose problème, insiste Songoli. Une journée syndicale de réflexion sur la privatisation de l’éducation sera organisée pour débattre de cette problématique.