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Internationale de l'Education
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Kenya: impasse des négociations syndicales concernant la grève liée aux salaires

Publié 6 septembre 2012 Mis à jour 10 septembre 2012

Le Kenya National Union of Teachers (KNUT) et le Kenya Union of Post Primary Education Teachers (KUPPET), deux des affiliés de l'IE au Kenya, ont entamé leur grève relative aux salaires, lundi 3 septembre. Les enseignant(e)s ont bravé une décision de justice déclarant leur grève illégale et ont revendiqué leur droit de grève. A la suite de leur grève, les syndicats ont entamé des négociations avec le gouvernement, mais celles-ci sont entrées dans une impasse, mardi soir, 4 septembre.

Les négociations avaient été suspendues pour donner au gouvernement le temps d'entamer des consultations, a dit le Président du KNUT, Wilson Sossion. « La grève est toujours en cours, étant donné que rien n'incite à la reprise du travail. »

Une grève réussie

Le KNUT a informé l'IE que, le 6 septembre, le quatrième jour de grève nationale, les actions entreprises ont été complètement couronnées de succès. Aucun(e) enseignant(e) ne s'est présenté(e) à l'école, excepté les directeurs/trices et principaux/ales, responsables des installations scolaires.

Le gouvernement a insisté pour que le syndicat suspende la grève avant d'entamer toute négociation avec lui. Toutefois, les enseignant(e)s ont refusé de suspendre la grève, donc les responsables gouvernementaux n'ont pas eu d'autre choix que d'entamer les discussions avec les responsables du syndicat le mercredi, 5 septembre, et celles-ci étaient toujours en cours le lendemain.

La grève des enseignant(e)s en dépit des décisions judiciaires

« Nous n'allons pas permettre au gouvernement de se cacher derrière les tribunaux pour éluder ses obligations et priver les enseignants de leurs droits constitutionnels de revendiquer de meilleures conditions salariales, ainsi que leur droit d'organisation », a dit Sossion. « Nous avons été tolérants et généreux, lorsque nous avons demandé que le gouvernement nous donne une augmentation salariale de 300 pour cent. Mais sa décision de porter l'affaire en justice nous incite à exiger le paiement total, comme condition requise, avant que nos membres ne retournent en classe. »

Il a ajouté que le KNUT considère les ordonnances du conseil de prud'hommes comme nulles et non avenues: « Pour nous, les ordonnances sont insignifiantes. La grève bat son plein. »

Les enseignant(e)s ne se sont pas présenté(e)s en classe, le 3 septembre, alors que des milliers d'enfants rentraient à l'école pour le troisième et dernier trimestre.

Sossion a dit que la décision de la Commission au service des enseignants d'aller en justice avait mis les enseignant(e)s en colère, les incitant à poursuivre leur action de grève et à ajouter de nouvelles exigences, qu'ils veulent voir satisfaites avant de retourner en classe.

Les revendications des enseignant(e)s

A part les 300 pour cent d'augmentation salariale, auxquels le gouvernement s'est engagé en 1997, mais qu'il n'a encore réalisés, le syndicat demande également une indemnité de responsabilité de 30 à 50 pour cent pour les principaux/ales, les directeurs/trices d'école et leurs adjoint(e)s, les enseignant(e)s seniors, ainsi que les responsables départementaux/ales. Sossion a dit que le syndicat demandait maintenant le versement de 33 milliards de shillings kényans, correspondant à une augmentation des indemnités de retraites de plus de 52.000 enseignant(e)s retraité(e)s.

Les demandes du KNUT incluent également l'harmonisation des salaires des enseignant(e)s avec ceux des autres fonctionnaires, et l'application intégrale de l'Avis juridique N°534 de 1997 concernant les indemnités des enseignant(e)s, notamment relatives au logement, au déplacement et aux frais médicaux. Les salaires négociés à la suite de la grève nationale des enseignant(e)s de 1997 ont été intégralement payés en cinq phases, mais les indemnités sont restées impayées.

La grève nationale est également soutenue par le KUPPET, dont le Secrétaire général, Akelo Misori, a demandé aux éducateurs/trices de rester à la maison, tant que leurs demandes ne seront pas satisfaites.

Des menaces d'actions disciplinaires, proférées par le Secrétaire de la Commission au service des enseignants, Gabriel Lengoibon, n'ont pas eu d'impact sur la détermination des membres des syndicats de l'éducation de partir en grève.

Les demandes des parents

Les dirigeants des syndicats de l'éducation ont également dit qu'ils ignoreraient les appels du Président des associations de parents, Musau Ndunda. Celui-ci a prétendu que la grève ruinerait l'avenir des élèves et des étudiant(e)s qui se préparent à passer leurs examens finaux dans un mois. Le Ministre de l'Education, Mutula Kilonzo, a dit que la décision du syndicat de braver l'ordonnance judiciaire témoigne d'une impunité qui ne peut être tolérée.

Les responsables du syndicat ont décrit les décisions judiciaires comme « subterfuges politiques ». « Comment une telle ordonnance peut-elle être rendue en pleine grève? », a dit le Secrétaire du KNUT du Comté de Mombasa, Dan Aloo.

Le Président du KNUT, Wilson Sossion, a insisté que les enseignant(e)s se battaient tout simplement pour leurs droits. Il a dit que le syndicat avait écrit au ministre, en demandant qu'il retire dans les quarante-huit heures ses remarques, selon lesquelles la grève des enseignant(e)s était motivée par des raisons politiques.

La négociation

Le 4 septembre, le Ministre de l'Education, Mutula Kilonzo, a déclaré que les 300 pour cent d'augmentation demandés par les enseignant(e)s étaient excessifs. Mutula a dit que le seul montant qu'ils pouvaient offrir devait correspondre au budget. Toutefois, il a dit être ouvert au dialogue avec les syndicats de l'éducation, afin de convenir d'une somme appropriée.

Le lendemain, les représentant(e)s du KNUT et du KUPPET, ainsi que les responsables du Ministère de l'Education, du Ministère des Services publics, du Ministère des Finances, du Cabinet juridique de l'Etat, et de la Commission au service des enseignants, ont participé à une réunion présidée par le Ministre du Travail, John Munyes Kiyong'a. La réunion avait pour but de trouver une issue à la crise.

Le soutien de l'ancien Ministre de l'Education

Les syndicats ont reçu le soutien de l'ancien Ministre de l'Education, Joseph Kamotho, qui avait négocié l'accord sur les salaires avec les enseignant(e)s en 1997. Il a indiqué que l'accord devrait tout d'abord être honoré, avant que de nouvelles négociations ne soient entreprises. « Le gouvernement devait d'urgence résoudre ce problème », a-t-il dit.

Il a souligné que le gouvernement devrait suivre la Loi relative aux salaires des enseignants, qui stipule les modalités de négociation entre le KNUT, la Commission au service des enseignants, et les Ministères de l'Education et des Finances.

« La Loi relative aux salaires des enseignants n'a pas été abrogée, donc la meilleure chose à faire est de mettre l'accord en œuvre comme convenu, par le biais du Comité traitant de la rémunération des enseignants, avant de passer à la nouvelle Commission sur les salaires et rémunérations », a dit Kamotho. « Etant donné que le gouvernement devra toujours honorer cet accord, le plus tôt sera le mieux. »

Il a également noté l'erreur du gouvernement et de la Commission au service des enseignants consistant à déclarer la grève illégale, en indiquant qu'ils avaient agi trop tard. « Pourquoi est-ce arrivé après que l'avis (de grève) a expiré? Vous n'émettez pas une décision judiciaire lorsque l'avis a déjà expiré, et c'est pourquoi le KNUT dit qu'elle est illégale, et ils ont raison à ce sujet. »

L'IE : Respect des droits syndicaux des éducateurs/trices

« Le droit de grève et le droit de négociation collective des syndicalistes de l'éducation sont inaliénables », a dit la Coordinatrice régionale principale de l'IE, Assibi Napoe. « Nous louons les autorités kényanes pour avoir entamé des négociations avec nos affiliés en vue d'atteindre des accords consensuels que le gouvernement finirait par accepter. Nous avons foi en les négociations, mais rien n'en est encore ressorti pour nos collègues. Il est triste que les enseignant(e)s kényan(e)s aient toujours dû se battre pour obtenir ce qui leur était dû, pour le bien des enfants et du Kenya. »

Elle a dit que les autorités kényanes devaient comprendre qu'offrir des salaires et des conditions de travail et de vie décents améliorera la qualité de l'éducation dans ce pays. Cela permettra au Kenya d'avancer sur la voie de la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement, notamment l'Education pour Tous.

Vidéo d'une manifestation pacifique des enseignant(e)s à Nairobi:

Vidéo de Citizen News sur la grève au Kenya: