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Niger: l’évaluation des enseignant(e)s contestée dans sa conduite et ses conséquences

Publié 13 septembre 2017 Mis à jour 12 septembre 2017

Tandis que les syndicats de l’éducation du Niger ne sont pas opposés à l’évaluation des enseignant(e)s, ils critiquent le fait que le ministre n’ait pas écouté leurs conseils concernant la forme que ces tests devraient prendre et les conséquences sur la carrière des enseignant(e)s.

Le Ministre de l’Enseignement Primaire, de l’Alphabétisation, de la Promotion des Langues Nationales et de l’Education Civique, Daouda Mamadou Marthé, a annoncé le 8 février que les enseignant(e)s, titulaires comme contractuel(le)s seraient évalué(e)s dans le cadre d’un projet de feuille de route sur la restauration de la qualité de l’éducation au Niger.

Cette décision fait suite aux résultats du plan national connu comme l’« Initiative de formation à distance des maîtres », qui a fait ressortir le bas niveau des enseignants, ainsi qu’aux résultats du Programme d'analyse des systèmes éducatifs (PASEC) de la Conférence des ministres de l'Education des Etats et gouvernements de la Francophonie (CONFEMEN) de 2014 qui a montré que les étudiant(e)s nigérien(ne)s sont les moins performant(e)s des dix pays francophones concernés.

Les enseignant(e)s contractuel(le)s ont été les premiers/ières à être évalué(e)s sur deux matières, les mathématiques et le français, à un niveau de primaire. Au Niger, sur 80.000 enseignant(e)s, 60.000 sont contractuel(le)s, soit trois enseignant(e)s sur quatre.

Le gouvernement n’a pas écouté les syndicats

L’évaluation s’est faite sur table et non en situation de classe, comme les syndicats le demandaient. Selon le ministre, c’est parce que l’insuffisance d’encadrant(e)s (inspecteurs/trices et conseillers/ières pédagogiques) ne permettait pas de suivre sur le terrain l’ensemble des contractuel(le)s au cours de l’année scolaire. Le contenu des épreuves a été défini par le ministère de l’Enseignement Primaire, aucune organisation syndicale n’ayant été consultée dans l’élaboration de celles-ci.

Les syndicats dans leur écrasante majorité ont lancé le mot d’ordre de boycott de cette évaluation, demandant à leurs militant(e)s de ne pas déposer les dossiers, parce que ce dépôt marque le commencement de cette évaluation jugée illégale par l’ensemble des syndicats. Ce mot d’ordre syndical a été peu suivi, principalement par crainte d’une sanction de la part  du gouvernement.

Sur les 56.000 contractuel(le)s évalué(e)s, 18.737 ont obtenu la moyenne ou plus au test, soit 33,5%, 47,3% ont obtenu entre 5 et 10 sur 20, et 19,2% moins de 5 sur 20 au test.

Suite à cette évaluation, le Ministère a décidé que les enseignant(e)s ayant une note inférieure ou égale 3 sur vingt verront leurs contrats purement et simplement résiliés. Cependant, ils/elles seront recyclé(e)s dans d’autres métiers, comme la menuiserie ou la couture, au niveau du ministère de la formation professionnelle. Ces enseignant(e)s ont d’ores et déjà commencé à recevoir les avis de résiliation  de leurs contrats. Ceux/Celles ayant obtenu des notes supérieures à 3 et inférieures à 10 devront suivre des formations de remédiation, en vue d’un renforcement des capacités, puis seront réévalué(e)s.

Nécessaire formation ou reconversion des enseignant(e)s

Lors d’une rencontre avec le ministre le 18 août, l’Internationale de l’Education (IE) est intervenue pour soutenir ses affiliés au Niger, à savoir le SYNAFEN, le SNEB, le SNEN, le SYNTEN et le SYNATREB, et a insisté pour qu’aucun(e) enseignant(e) contractuel(le), quel que soit son niveau, ne soit licencié(e).

Ils ont profondément regretté que le ministre n’ait pas suffisamment pris en compte les mises en garde des syndicats, et rappelé que, si l’évaluation des enseignant(e)s constitue un outil servant à mettre en place des plans de formation, améliorant ainsi la qualité de l’éducation, elle ne doit pas être comme en l’espèce un processus précipité, brutal et excluant.

Les syndicats resteront vigilants et vérifieront qu’une formation réelle est fournie aux enseignant(e)s contractuel(le)s, et que la reconversion prévue est bien possible si besoin.