Ei-iE

Mondes de l'éducation

GPE Kelley Lynch
GPE Kelley Lynch

Un appel à l'action : appliquer les recommandations de l'ONU pour revaloriser la profession enseignante

Publié 26 février 2024 Mis à jour 26 février 2024
Écrit par:

Le 26 février dernier, le Groupe de haut niveau des Nations Unies sur la profession enseignante a publié ses 59 recommandations à l’intention des gouvernements afin de renforcer la profession et de garantir que les enseignantes et les enseignants soient valorisé·e·s et respecté·e·s. Le Groupe de haut niveau et ses recommandations générales sont le résultat d’un plaidoyer inlassable de la part des syndicats. Il incombe aux gouvernements de mettre en œuvre ces recommandations pour faire en sorte que chaque enfant bénéficie, chaque jour et à chaque leçon, de l’enseignement d’un enseignant ou d’une enseignante qualifié·e.

Le Groupe de haut niveau sur la profession enseignante a été mis sur pied par le Secrétaire général des Nations Unies António Guterres en réponse à la pénurie mondiale croissante et alarmante d’enseignantes et d’enseignants. Alors que le monde nécessite 44 millions d’enseignantes et d’enseignants supplémentaires afin de garantir l’éducation de qualité pour toutes et tous, de plus en plus sont forcé·e·s de quitter la profession qui les passionne et le nombre de personnes souhaitant rejoindre la profession dont le monde a besoin diminue. Dans ces circonstances, les personnels enseignants présentent des signes d’épuisement professionnel et les élèves en paient le prix.

La pénurie elle-même n’est pas nouvelle. Cela a fait des années que les syndicats tirent la sonnette d’alarme dans de nombreux pays. Il a fallu une pandémie occasionnant une perturbation sans précédent de l’éducation partout dans le monde pour la prise de conscience de la gravité de la situation et de la nécessité de prendre des mesures concrètes et immédiates. Il aura également fallu le plaidoyer sans relâche de l’Internationale de l’Education et de nos organisations membres pour que les Nations Unies écoutent.

Le Groupe de niveau des Nations Unies a réuni des experts et des expertes du monde entier : ministres de l’éducation, anciennes présidentes, universitaires, représentants et représentantes de la société civile et le plus important, les personnels enseignants, les élèves et leurs syndicats. L’Internationale de l’Education y était également représentée par le biais de notre présidente Susan Hopgood et de nos collègues Manal Hdaife, présidente de la Structure interrégionale des pays arabes de l’Internationale de l’Education, et de Mike Thiruman, secrétaire général de Singapore Teachers Union. Aussi avons-nous réussi à nous faire clairement entendre tout au long des délibérations, comme l’illustrent les recommandations.

Des recommandations audacieuses pour transformer l’éducation

Chaque membre lisant les 59 recommandations du Groupe de haut niveau reconnaîtra nos revendications de longue date sur un large éventail de questions, des qualifications des enseignantes et des enseignants, aux salaires et aux conditions de travail en passant par le respect professionnel.

Le Groupe de haut niveau déclare que l’investissement dans la profession enseignante constitue la stratégie la plus efficace pour bâtir des systèmes éducatifs résilients et de qualité. La recommandation n°8 fait écho à ce que les syndicats disent depuis des années : « le financement à long-terme en faveur d’enseignants et d’enseignantes qualifié·e·s et bien soutenu·e·s est un investissement dans la qualité et la durabilité des systèmes éducatifs ».

Cela implique de garantir des salaires compétitifs, équitables et professionnels conformément à ceux d’autres professions ayant les mêmes prérequis académiques. Cela se traduit également par de bonnes conditions de travail pour notre personnel de l’éducation, dont nos collègues de soutien à l’éducation. Les enseignantes et les enseignants doivent avoir une charge de travail raisonnable et un ratio élève/enseignant·e rendant possible l’enseignement et l’apprentissage de qualité. L’emploi précaire qui éloigne tant de personnes de la profession et les mesures provisoires contreproductives, telles que le recours aux enseignantes et enseignants contractuel·le·s et au personnel non qualifié doivent cesser.

Les recommandations lancent un appel clair en faveur d’environnements de travail inclusifs, sûrs et non-discriminatoires pour les enseignantes et les enseignantes. Les personnels doivent être protégés contre toutes formes de violence, de discrimination et de harcèlement y compris la violence à l’égard des femmes. L’équité salariale doit être garantie et le leadership des femmes encouragé.

Notre professionnalisme est reconnu et encouragé dans l’ensemble des recommandations. Le Groupe de haut niveau recommande que les pays garantissent que l’ensemble des enseignantes et des enseignants soient titulaires d’un diplôme universitaire et aient accès à une formation initiale de qualité ainsi qu’au développement professionnel continu. Ce dernier doit être équitable, gratuit, s’inscrire dans leurs fonctions officielles et être conçu conjointement avec notre profession.

Le respect et la valorisation des enseignantes et des enseignants impliquent également de les associer à l’élaboration des politiques. Le Groupe de haut niveau est clair à cet égard : notre expertise et nos connaissances doivent éclairer et façonner les politiques qui nous affectent. Les personnels enseignants et leurs organisations doivent être autour de la table lorsque les décisions sont prises. Le dialogue social et politique, dont les négociations collectives, occupe une place importante dans les recommandations en tant que principal mécanisme de détermination des conditions de travail et des politiques éducatives, telles que le recours à la technologie dans nos écoles et salles de classe. Notre droit de grève est réaffirmé.

L’enthousiasme suscité par les recommandations est justifié. Mais nous savons que celles-ci ne seront traduites dans les faits sans financement. Les recommandations du Groupe de haut niveau sur le financement de l’éducation sont à la hauteur de la situation. L’éducation publique doit être protégée contre les mesures d’austérité. Il est pertinent de souligner que le Groupe de haut niveau appelle les institutions financières internationales, telles que la Banque mondiale et le Fonds monétaire international à mettre fin à toutes les mesures limitant les dépenses consacrées à l’éducation et aux salaires des personnels enseignants qui, depuis longtemps, portent atteinte au droit de chaque élève à un enseignant ou une enseignante qualifié·e.

Les personnels enseignants opérant dans les situations d’urgence n’ont pas non plus été oubliés. Le Groupe de haut niveau appelle la communauté internationale à mettre sur place un Fonds mondial pour les salaires des enseignantes et des enseignants. Ce Fonds garantirait aux personnels intervenant dans les situations de crise le paiement de salaires équitables et à temps, compte tenu du caractère vital de leur travail d’enseignement et de soutien aux enfants les plus vulnérables dans les situations les plus difficiles.

Des recommandations à l’action

Cette nouvelle donne est le fruit de notre plaidoyer infatigable. Les recommandations du Groupe du haut niveau mettent à notre disposition un nouvel ensemble d’outils pour véritablement transformer l’éducation et susciter un vrai changement pour des millions d’enseignantes, d’enseignants et d’élèves à travers le monde. Nous devons maintenant passer aux étapes suivantes et veiller à ce que nos gouvernements répondent à l’appel.

Les recommandations appellent à la création de commissions nationales réunissant les syndicats de l’éducation et les gouvernements afin de remédier à la pénurie de personnels enseignants et d’assurer le suivi de la mise en œuvre des recommandations. Nous devons nous assurer que ces commissions soient mises en place et s’attaquent aux questions difficiles auxquelles vous êtes confronté·e·s.

Le temps est venu d’organiser, de mobiliser et de joindre nos forces à la campagne La force du public : Ensemble on fait école ! et de veiller à ce que nos gouvernements financent pleinement l’éducation et investissent dans notre profession. Notre moment est venu. Notre puissance syndicale peut transformer l’éducation à travers le monde. Faisons bouger les choses.

Le contenu et les avis exprimés dans ce blog sont ceux de son auteur et ne reflètent pas nécessairement la position officielle de l’Internationale de l’Education.