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Les syndicalistes de l’éducation réclament une éducation publique gratuite de qualité pour éradiquer la pauvreté des femmes et des filles

Publié 13 mars 2024 Mis à jour 18 mars 2024

La 68e session de la Commission de la condition de la femme des Nations Unies se tient à New York du 11 au 22 mars. Cette commission est la tribune la plus importante au niveau mondial pour faire avancer l’égalité entre les femmes et les hommes et les droits et conditions des femmes. Une délégation de 17 femmes syndicalistes de l’éducation, venues de 11 pays, se trouve actuellement à New York pour réclamer des investissements publics dans l’éducation, un élément majeur pour éliminer la pauvreté et réaliser les droits des femmes.

La 68e session de la Commission de la condition de la femme des Nations Unies portera essentiellement sur le thème « Accélérer la réalisation de l’égalité entre les hommes et les femmes et l’autonomisation de toutes les femmes et les filles en s’attaquant à la pauvreté et en renforçant les institutions et le financement dans une perspective d’égalité entre les hommes et les femmes ».

Selon les données des Nations Unies, 10,3 % des femmes vivent aujourd’hui dans une situation d’extrême pauvreté et sont plus pauvres que les hommes. Le progrès vers l’éradication de la pauvreté devrait être 26 fois plus rapide pour atteindre les Objectifs de développement durable d’ici 2030. Des investissements sont nécessaires de toute urgence.

Une grande partie de la pauvreté dont souffrent les femmes trouve son origine dans leur absence d’accès à l’éducation. L’éducation est essentielle pour éradiquer la pauvreté, car elle autonomise les individus, leur donne les compétences dont elles et ils ont besoin pour subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille, contester les normes de genre et permettre aux individus et aux sociétés de croître. Pourtant, plus de 130 millions de filles sont toujours privées de leur droit à l’éducation.

Le plaidoyer de l’Internationale de l’Éducation devant la Commission de la condition de la femme des Nations Unies

Tout au long d’une série d’événements organisés en marge de la Commission de la condition de la femme des Nations Unies, la délégation de l’Internationale de l’Éducation va souligner la nécessité d’investir dans une éducation publique gratuite de qualité pour assurer l’accès de toutes et tous à l’éducation, y compris les personnes les plus marginalisées, et faire en sorte que les personnels de l’éducation, dont la majorité sont des femmes, soient valorisés et respectés.

Le 11 mars, lors de l’événement organisé par la Confédération Syndicale Internationale et intitulé « Les femmes dans les syndicats luttent contre la pauvreté à travers un monde du travail transformateur pour l'égalité de genre », Ann Mari Milo Lorentzen, membre du Bureau exécutif de l’IE, a évoqué les difficultés que rencontrent les éducateur·trice·s de la petite enfance. Mme Lorentzen a également souligné l’impérieuse nécessité d’investir dans l’éducation de la petite enfance à la fois pour soutenir l’épanouissement précoce des enfants et donner aux femmes l’autonomie de trouver des débouchés en dehors du secteur des soins aux personnes.

Le 12 mars, Heidi Yetman, Présidente de la Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants et membre de la délégation de l’IE, a parlé du pouvoir de l’éducation pour l’autonomisation des femmes lors d’un événement organisé par l’Université des femmes du Canada.

Le 13 mars, la délégation de l’IE mettra en lumière le fléau que subissent les filles et les enseignantes en Afghanistan auxquelles il est interdit d’aller à l’école et d’enseigner depuis 2021. L’Internationale de l’Éducation organisera un événement pour faire connaître les résultats préliminaires d’une enquête menée auprès du personnel enseignant afghan sur l’état de la profession et du droit à l’éducation dans le pays depuis la prise de pouvoir par les Talibans.

Le 15 mars, Haldis Holst, Secrétaire générale adjointe de l’Internationale de l’Éducation, animera une session organisée par l’initiative des Nations Unies pour l’éducation des filles, aux côtés de l’UNESCO et de l’UNICEF, qui portera sur l’accélération de l’égalité de genre dans et par l’éducation. Les partenaires et parties prenantes intersectorielles se réuniront pour évaluer la situation de l’éducation des filles et les politiques, programmes et financement d’une éducation transformatrice pour l’égalité de genre, discuter des points de blocage et des obstacles au progrès, et proposer des solutions destinées à contribuer à l’accélération du mouvement.

L’impératif de la campagne « La force du public : Ensemble on fait école »

Il est essentiel d’investir dans l’éducation et dans la profession enseignante pour garantir la qualité de l’enseignement dispensé dans nos écoles. Selon les Nations Unies, le monde a besoin de 44 millions d’enseignant·e·s supplémentaires pour parvenir à un enseignement primaire et secondaire universel. Toutefois, un nombre croissant d’enseignant·e·s quittent la profession et rares sont les personnes qui souhaitent y entrer. La pénurie alarmante d’enseignant·e·s a été alimentée par des décennies de sous-investissement chronique dans l’éducation et dans la profession. Les données mettent en évidence la gravité du problème, les budgets alloués à l’éducation ayant chuté dans 65 % des pays à revenu faible et moyen depuis la pandémie de COVID-19. Même dans les pays à revenu moyen élevé et à revenu élevé, 33 % d’entre eux enregistrent une baisse des budgets de l’éducation.

Les syndicalistes de l’éducation du monde entier se sont mobilisés pour appeler les gouvernements à financer l’éducation publique dans le cadre de la campagne « La force du public : Ensemble on fait école » et à faire en sorte que les personnels enseignants soient valorisés et respectés pour le travail essentiel qu’ils accomplissent.

« Notre campagne est un effort mondial pour garantir à chacun le droit à l’éducation, partout, et en particulier pour les enfants les plus vulnérables, dont la plupart sont des filles. C’est également un effort pour garantir que notre profession, dominée par les femmes dans de nombreuses parties du monde, reçoive la reconnaissance et le respect qu’elle mérite. »

Susan Hopgood | Présidente de l’Internationale de l’Éducation

L’éducation au pouvoir des femmes

La profession enseignante lutte contre les lourds effets des stéréotypes de genre et des normes sociales qui empêchent la reconnaissance du travail essentiel des professionnels de l’éducation, en particulier des femmes. La profession est féminisée, les femmes étant surreprésentées dans les effectifs dans de nombreuses régions du monde. Depuis 2015, la proportion d’enseignantes a augmenté dans le primaire et le secondaire inférieur et supérieur. Dans l’enseignement maternel, les femmes représentent 94 % du personnel enseignant. Dans les niveaux supérieurs, leur nombre diminue. Les femmes représentent 68 % du personnel enseignant dans le primaire, 58 % dans le secondaire inférieur, 52 % dans le secondaire supérieur et 43 % dans l’enseignement supérieur et universitaire. Parallèlement, les femmes sont sous-représentées dans les postes de direction dans les écoles.

En 2023, le baromètre I-Best a mesuré la santé et le bien-être des personnels de l’éducation. Plus de 26 000 professionnel·le·s de l’éducation ont participé à l’enquête, dont plus de 72 % étaient des femmes. Les résultats sont alarmants : les professionnel·le·s de l’éducation font face à la violence, au harcèlement et à une charge de travail lourde qui les empêche de concilier sainement vie privée et vie professionnelle. Plus de la moitié des participant·e·s ont été victimes ou témoins de violence sur leur lieu de travail.

Appel à l’action des Nations Unies en faveur des enseignant·e·s et d’une éducation de qualité

En réponse à la pénurie mondiale alarmante de personnel enseignant, le Secrétaire général des Nations Unies a mis sur pied un Groupe de haut niveau sur la profession enseignante afin de guider l’action des gouvernements en faveur des enseignant·e·s et de l’éducation.

Les recommandations du Groupe de haut niveau font écho à de nombreuses revendications syndicales et appellent à soutenir, valoriser et rémunérer à leur juste valeur les enseignant·e·s et le personnel de soutien à l’éducation. Les charges de travail et les conditions de travail doivent soutenir le bien-être physique et mental des personnels de l’éducation. Les salaires doivent être compétitifs par rapport à ceux de professions comparables et ils doivent être décidés à la table des négociations avec les enseignant·e·s et leurs syndicats. L’équité salariale entre hommes et femmes doit être garantie et le leadership des femmes doit être encouragé.

Les recommandations appellent également à mettre en place des environnements de travail éducatifs inclusifs, sûrs et non discriminatoires pour les enseignant·e·s dans toute leur diversité, notamment le personnel en situation de handicap. Les enseignant·e·s doivent être protégé·e·s contre toutes les formes de violence et de harcèlement, y compris la violence sexiste.

Le personnel enseignant travaillant dans des situations d’urgence doit également être soutenu. Le Groupe de haut niveau appelle la communauté internationale à créer un Fonds mondial pour les salaires des enseignant·e·s afin que le personnel enseignant travaillant dans des situations de crise perçoive un salaire équitable en temps et en heure. Leur travail d’enseignement et de soutien aux enfants les plus vulnérables est essentiel.

Lors de la Commission de la condition de la femme des Nations Unies et au-delà, les syndicats de l’éducation plaideront pour la mise en œuvre urgente de ces recommandations.