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Royaume-Uni: solidarité, démocratie et unité – des questions de grande importance pour les syndicats de l'éducation

Publié 24 avril 2019 Mis à jour 29 avril 2019

Lors de leurs conférences annuelles, la National Association of Schoolmasters Union of Women Teachers et le National Education Union, deux affiliés de l'Internationale de l’Education, ont réaffirmé leurs valeurs fondamentales et leur détermination à plaider en faveur de politiques éducatives bénéfiques pour les éducateur·rice·s et les étudiant·e·s.

NASUWT: depuis toujours pour la défense et la protection des enseignant·e·s

La conférence annuelle de la National Association of Schoolmasters Union of Women Teachers(NASUWT) s'est tenue à Belfast du 19 au 21 avril 2019 en présence d'invité·e·s originaires de 25 pays et territoires.

La solidarité internationale s'est vu accorder une place importante tout au long de la conférence. Patrick Roach, Secrétaire général adjoint de la NASUWT et membre du Bureau exécutif de l’Internationale de l'Education (IE), a présidé une table ronde avec des collègues internationaux·ales. Un débat et diverses contributions ont porté sur la question suivante: « La démocratie a-t-elle été éclipsée? Solidarité internationale, syndicats et démocratie ». Cette discussion a révélé l'inquiétude des organisations syndicales à l'égard de l'éducation. Le huitième Congrès mondial de l'IE, qui se déroulera en juillet à Bangkok, en Thaïlande, abordera également ce sujet.

Lily Eskelsen Garcia (NEA/Etats-Unis), Manuela Mendonça (FENPROF/Portugal) et Davanand Sinanan (Trinidad-and-Tobago Unified Teachers’ Association), membres du Bureau exécutif de l’IE, ainsi que Susan Flocken, Directrice du Comité syndical européen de l'éducation (CSEE), le Bureau européen de l’Internationale de l’Education, ont notamment pris part à cette conférence.

La NASUWT a également présenté son rapport international de l'année 2019 et déclaré qu'elle continuerait à apporter soutien pratique et solidarité aux syndicats d'enseignants partenaires à travers le monde.

Le syndicat a récompensé Roberto Baradel de la CTERA/Argentine en lui décernant l' International Solidarity Award 2019, tandis que Jalila al Salman et Madhi Abu Dheeb du BTU/Bahreïn, tous deux présents à la conférence, ont salué l'engagement de longue date de la NASUWT pour rendre justice aux enseignant·e·s du Bahreïn.

Cette édition de la conférence annuelle a marqué le début des célébrations du centenaire de la NASUWT. « Cette conférence sera d'une importance particulière pour la NASUWT, car nous fêtons les 100 ans de notre association qui porte la parole des enseignants depuis sa création. Nous nous targuons de défendre et protéger depuis longtemps les enseignants face aux agitations et aux obstacles, et cette conférence nous offre l'occasion de réaffirmer cet engagement », a expliqué Chris Keates, Secrétaire générale de la NASUWT avant l'événement.

Elle a également souhaité la bienvenue à David Kitchen, un enseignant de Liverpool, qui a pris ses fonctions de Président de la NASUWT il y a peu: « Dave comprend bien les nombreux enjeux qui touchent nos membres. Il sera un fervent défenseur de la profession enseignante. »

Insistant sur le fait que les salaires, les conditions de travail et l'indiscipline des étudiant·e·s représentaient des problèmes majeurs, elle a ajouté que « les enseignants [n'avaient] pas le sentiment d'être valorisés en tant que professionnels dans l'une ou l'autre facette de leur travail » et que « l'augmentation du nombre d'élèves par classe ainsi que le manque de soutien pour les élèves ayant des besoins éducatifs spéciaux ou un handicap dans les écoles ordinaires contribuaient à renforcer l'indiscipline des élèves ».

D'autre part, elle a fait part de ses préoccupations quant aux pratiques de certaines écoles, qui reportent systématiquement la faute sur l'enseignant·e lorsqu'il est question de l'indiscipline des étudiant·e·s.

« Le report de l'âge de la retraire à 68 ans pour les enseignants est totalement irréaliste quand on voit que certains n'en peuvent déjà plus après seulement quelques années dans la profession », a-t-elle alerté.

Les motions proposées lors de la conférence, qui ont été sélectionnées par vote des membres, concernaient notamment la santé mentale des enseignant·e·s, l'indiscipline des étudiant·e·s, le financement de l'éducation, la pénurie d'enseignant·e·s, la discrimination fondée sur l'âge, le salaire, l'évaluation, les réformes de pensions et l'accès à la formation.

Durant la conférence, la NASUWT a également présenté ses recherches sur l'indiscipline et la violence des étudiant·e·s, le harcèlement que subissent les enseignant·e·s, l'impact des courriels sur la charge de travail des étudiant·e·s ainsi que les dépenses que les enseignant·e·s engagent pour les ressources scolaires et les besoins des étudiant·e·s.

Les documents clés de la conférence de la NASUWT peuvent être téléchargés ici(en anglais), et l'interview que Keates a donné au Times Education Supplement au sujet de la conférence peut être visionnée ici(en anglais).

NEU: u n nouveau syndicat pour façonner un avenir meilleur pour l'éducation

Le National Education Union(NEU) a organisé sa toute première conférence annuelleà Liverpool du 15 au 18 avril. Le NEU est le fruit de la fusion entre l' Association of Teachers and Lecturers(ATL) et le National Union of Teachers(NUT).

« Nous avons créé un nouveau syndicat, car nous voulions façonner un avenir meilleur pour l'éducation. Un avenir meilleur pour nos élèves. Un avenir meilleur pour les enseignants et le personnel de soutien au service des élèves. Et nous voyons que certains efforts portent déjà leurs fruits. Notre nouveau syndicat s'est déjà fait une solide place et réputation sur la scène politique dans le débat sur l'éducation », a souligné Kevin Courtney, co-Secrétaire général du NEU.

Et d'ajouter: « Nous détectons le potentiel que représente le fait d'offrir une expérience éducative revitalisante dans chaque classe, et c'est cet avenir que nous visons. Mais nos enseignants, notre personnel de soutien et nos élèves rencontrent véritablement de très profondes difficultés, que nous affrontons ensemble. » Selon Kevin Coutrney, il est « important que les enseignants et le personnel de soutien puissent compter sur un syndicat fort lorsqu'ils se retrouvent face à ces problèmes. Les mesures que prennent nos membres dans tout le pays sont cruciales. Mais le syndicat se tient toujours prêt à soutenir ses membres quand c'est nécessaire. »

Selon Courtney, un autre élément important dans la stratégie globale du NEU est « de savoir que, dans la plupart des cas, les parents affichent un grand soutien pour les enseignants et les membres du personnel de soutien ».

Saluant le fait que la campagne de financement du NEU connaît un succès grandissant, il a reconnu que « le financement des écoles et des universités [était] un problème qui ne se [résoudrait] pas tout seul » et « qu'aucun responsable politique ne [pouvait] ignorer le fait que 750.000 personnes [avaient] changé leur décision de vote aux dernières élections générales en raison de la problématique du financement des écoles ». En conséquence, il a appelé les délégué·e·s « à encourager l'implication des parents à l'approche des élections locales, et à fournir encore plus d'efforts que s'il s'agissait d'élections générales ».

Courtney a maintenu que « ce déclin dans la part du PIB affectée à l'éducation [devait] être enrayé », avant d'ajouter que « l'éducation [devait] être à nouveau considérée comme un investissement. Le travail que nous accomplissons tous au sein de cette organisation peut contribuer à maintenir les dépenses dans l'éducation au rang des priorités politiques suffisamment longtemps pour que ce gouvernement soit obligé d'y investir, faute de quoi il devra en subir les conséquences électorales. » « Vive l'ATL. Vive le NUT. Vive le NEU. L'union fait la force », a-t-il conclu.

Mary Bousted, co-Secrétaire générale du NEU et représentante de l'association au Sommet international sur la profession enseignante, qui s'est tenu en mars 2019 à Helsinki, Finlande, a expliqué que ces dernières années, elle avait siégé aux côtés du ministre aux Ecoles Nick Gibb, de ministres de l'Education et de dirigeant·e·s de 25 syndicats de pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques, ce qui lui avait donné l'occasion de discuter des systèmes d'éducation de chacun. « En effet, il nous est souvent arrivé d'être en désaccord total », a-t-elle confié. « Nick pense que la mise en concurrence des écoles permet de relever le niveau. Il le croit toujours alors qu'il a reçu la preuve du contraire. Ce que nous savons, c'est que la coopération et la collaboration entre les professionnels de l'éducation améliorent l'enseignement. »

Déplorant vivement le fait que « nos systèmes reposent sur un manque de confiance », elle a souligné que « sous ce gouvernement, nos membres sont constamment surveillés » par l'Ofsted, le bureau de l'inspection. « C'est notre système de responsabilisation des écoles, défaillant et toxique, qui empoisonne nos écoles, les professionnels de l'éducation qui y travaillent ainsi que nos enfants », a-t-elle déclaré lors de la conférence. « A l'épicentre de ce système de responsabilisation des écoles défaillant et toxique se trouve l'Ofsted. Plus que tout, l'Ofsted fait régner un climat de méfiance dans nos écoles. Il divise les directeurs et les enseignants. L'Ofsted fait fuir les enseignants et les chefs d'établissement de la profession. » Bousted a demandé la suppression de ce bureau.

Elle a reconnu que « les écoles [devaient] être tenues responsables, mais de manière proportionnelle, ciblée et intelligente », « d'une manière qui renforce le professionnalisme des enseignants et des directeurs, et qui permet de les maintenir dans la profession », « car aucun système d'éducation ne peut porter ses fruits lorsqu'il épuise les enseignants et les chefs d'établissements, pour ensuite les chasser ».

« Donc, Mesdames et Messieurs, nous sommes pour le moins ambitieux », a-t-elle souligné. « Nous voulons une réforme radicale de notre système d'éducation. Nous voulons un travail de qualité pour tous les membres du NEU, pour le personnel de soutien, pour les enseignants, pour les maîtres de conférences et pour les chefs d'établissement. Nous voulons être considérés comme des professionnels. Nous voulons qu'on nous fasse confiance. Accordez-nous votre confiance, tenez-nous responsables lorsqu'il y a lieu et vous verrez à quel point nous et nos élèves pouvons briller. »

Mugwena Maluleke, membre du SADTU/Afrique du Sud et du Bureau exécutif de l’IE, a été invité à intervenir à l'occasion de la conférence annuelle 2019 du NEU, lors de laquelle Jeremy Corbyn, chef du Parti travailliste, et Layla Moran, porte-parole du Parti libéral-démocrate pour l'éducation, ont également pu s'exprimer. Corbyn et Moran ont tous deux expliqué qu'ils avaient décelé des problèmes dans les tests normalisés, une évaluation officielle réalisée dans les écoles primaires en Angleterre. Moran a déclaré qu'elle supprimerait l'Ofsted, les tests normalisés et la base de référence, ce qui correspond bien à l'esprit de la campagne du NEU visant à façonner l'avenir de l'éducation, tandis que Corbyn a annoncé que le Parti travailliste supprimerait les tests normalisés, la base de référence et les tests phonétiques du système éducatif, et a déclaré aux délégué·e·s que son parti faisait confiance aux enseignant·e·s et aux personnels de soutien: « C'est vous, les professionnels. Vous connaissez votre travail. Vous connaissez vos élèves. »