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Les syndicats arabes de l’éducation lancent leur ComNet pour organiser des stratégies de communication efficaces

Publié 2 juin 2025 Mis à jour 10 juillet 2025

La toute première réunion du Réseau des communicant∙e∙s (ComNet) de la Structure interrégionale des pays arabes (SIRPA) de l’Internationale de l’Éducation (IE) a rassemblé des éducateur·trice·s et des dirigeant·e·s syndicaux·ales de toute la région arabe. La rencontre avait pour but de discuter des stratégies de communication et de campagne à mettre en œuvre pour relever les défis auxquels il·elle·s se trouvent confronté·e·s. Les participant·e·s ont souligné le rôle essentiel de la communication et de la solidarité dans la promotion de l’éducation et de la paix dans la sous-région.

La puissance de la solidarité

Présidente de la SIRPA et membre du Bureau exécutif de l’IE, Manal Hdaife a ouvert la réunion avec un message fort sur l’importance de l’unité : « Le travail en réseau et les relations au niveau du monde arabe sont très importants », a-t-elle souligné. « L’IE a joué un rôle crucial en consolidant les capacités de réseautage entre les différents syndicats à travers le monde, y compris au niveau de la région arabe. »

Elle a ajouté : « Nous gardons espoir, mais les syndicalistes ont vu leurs libertés restreintes. Les gouvernements cherchent à influencer le travail des syndicalistes en leur imposant des restrictions. Certains pays ne reconnaissent pas le syndicalisme, alors que la liberté syndicale fait l’objet d’une certaine censure. Nous recevons des plaintes de collègues qui affirment que la liberté de la profession enseignante est restreinte et compromise ».

Au Liban, le travail mené par son syndicat a permis d’« amorcer une nouvelle ère en temps opportun grâce à une communication intensive et à une coordination étroite que nous avons mises en place tout en communiquant avec nos pairs », a-t-elle indiqué.

À propos des stratégies mises en place par l’IE, elle a insisté sur le fait qu’il y a toujours eu un plaidoyer en faveur des droits humains et du droit de chaque enfant à accéder à l’école. À titre d’exemple, Mme Hdaife a participé au Groupe de haut niveau des Nations Unies sur la profession enseignante. Les 59 recommandations de l’ONU visent à « faire pression sur les gouvernements pour qu’ils respectent les conventions internationales ratifiées et redoublent d’efforts pour augmenter les salaires des enseignants et enseignantes, en particulier dans les zones de conflit ».

Un appel à la paix

Mme Hdaife a aussi saisi cette occasion pour lancer un appel à la paix et à la protection des institutions éducatives. « Nous avons certainement besoin de paix, et nous devons veiller à ce que toutes les parties respectent les écoles en tant que sanctuaires sûrs », a-t-elle insisté. « L’IE a lancé la campagne ‘Les écoles sont des sanctuaires sûrs, pas des cibles’, afin d’exclure les écoles des conflits armés. »

Cliquez ici pour accéder aux liens renvoyant aux études récemment publiées : « Just Wages for Public School Teachers in Lebanon » (Des salaires équitables pour les enseignant·e·s du secteur public au Liban), « Teacher Remuneration During Emergencies » (La rémunération des enseignant·e·s en situations d’urgence) et « Teacher Compensation in Crisis Contexts: Challenges in the Occupied Palestinian Territories » (La rémunération des enseignant·e·s dans des contextes de crise : défis dans les territoires palestiniens occupés).

Relever les différents défis régionaux

Najat Ganay, vice-présidente du Comité de la SIRPA, a évoqué les défis innombrables auxquels font face les éducateur·trice·s dans la région, notamment les guerres, les conflits et les catastrophes naturelles. « Nous avons besoin d’un réseau arabe solide pour promouvoir une éducation de qualité pour tous et toutes », a-t-elle déclaré. Mme Ganay a également souligné la nécessité d’augmenter les budgets et d’améliorer la communication entre les syndicats d’enseignant·e·s.

Renforcer la capacité d’action des femmes dans l’éducation

Mme Ganay a par ailleurs mis l’accent sur le rôle des femmes dans le mouvement syndical de l’éducation. « En tant que femmes, nous souffrons de notre faible représentativité », a-t-elle fait remarquer. « L’éducation est féminisée, avec 70 % de femmes parmi le corps enseignant, mais seulement 10 % aux postes de décision. » Le lancement d’un réseau de femmes de la SIRPA vise à remédier à ces disparités et à promouvoir des politiques sensibles à la dimension de genre, afin d’accroître le leadership des femmes et d’encourager celles-ci à se porter candidates aux élections.

Elle a également indiqué que son syndicat s’efforçait de surveiller toute violence dans les écoles ou aux abords des écoles à l’encontre du personnel éducatif, des enseignant·e·s ou des élèves.

L’importance d’une communication claire et cohérente

De son côté, Dalila El Barhmi, coordinatrice régionale de la SIRPA de l’IE, a souligné l’importance d’une communication efficace. « La communication est un plan stratégique pour atteindre notre objectif », a-t-elle déclaré. « Nous avons besoin d’informations simples, ciblées et claires par le biais de messages, de bulletins d’information et autres. » Elle a insisté sur la nécessité d’une communication claire et cohérente pour instaurer la confiance et atteindre des objectifs communs.

« Dans le cadre de leurs communications, nos collègues ont eu recours à des sondages et à des enquêtes auprès du public et des parents, ce qui leur a permis de conclure que les enseignants et enseignantes étaient considérés comme une source digne de confiance », a-t-elle indiqué. « Nous avons toujours la confiance du public, des parents, de notre communauté. Ils savent qu’il ne s’agit pas de fake news dès lors que cela vient des enseignants et enseignantes, qui se préoccupent de l’éducation de leurs enfants. »

« Depuis que la Structure interrégionale arabe a commencé à prendre de l’ampleur, la communication est devenue un outil crucial et important », a-t-elle poursuivi, soulignant le plan stratégique visant à utiliser la communication de manière efficace pour atteindre les objectifs et instaurer la confiance entre les syndicats.

Succès de la campagne « La force du public : ensemble on fait école ! » au Maroc

Nadia El Issaoui, de la Fédération nationale de l’enseignement – Union marocaine du travail (FNE-UMT), a évoqué les progrès accomplis dans le cadre de la campagne de l’Internationale de l’Éducation (IE) La force du public : ensemble on fait école ! au Maroc. La campagne a « un impact notable, grâce à la formation des responsables syndicaux locaux, régionaux et nationaux », a-t-elle indiqué.

Mme El Issaoui a, par ailleurs, souligné l’importance de la formation en ligne pour les enseignant·e·s des régions très reculées, ainsi que la nécessité de garantir la participation des femmes au dialogue. Son syndicat soutient également les enseignant·e·s qui apprennent des langues étrangères.

Communication autour de la Conférence de la SIRPA

Yasser Arafat, secrétaire général de l’ Egyptian Teachers Syndicate (ETS), a fait part des activités de communication de son syndicat autour de la conférence de la SIRPA. « Le syndicat avait une vision et a mis en place un plan d’action qui serait crédible et transmettrait la vérité », a-t-il expliqué.

L’ETS a engagé des journalistes de renom et dignes de confiance pour superviser ce qui est publié sur le site Internet du syndicat. Le syndicat publie également un journal : « Nous avons préparé une synthèse de toutes les conclusions de la conférence et consacré une édition spéciale de notre journal à l’événement. Celle-ci a compris des analyses quotidiennes des différentes sessions de la conférence. »

L’ETS a également couvert la visite du président de l’IE, Mugwena Maluleke, et du secrétaire général de l’IE, David Edwards, dans une école pour réfugié∙e∙s.

M. Arafat a aussi souligné le rôle des médias dans le renforcement des capacités et la formation des enseignant·e·s.

Stratégies de plaidoyer des éducateur·trice·s de Palestine

Saed Erziqat, secrétaire général du General Union of Palestinian Teachers (GUPT), a discuté des stratégies de communication déployées par les syndicats en Palestine.

Il a attiré l’attention sur « l’utilisation de la communication et la création de coalitions et de solidarités en vue du lancement de la plus grande campagne de solidarité dans la région arabe et dans le monde ». Nous avons collaboré avec les syndicats locaux palestiniens et diverses institutions, y compris des organisations de la société civile, dans le cadre d’une campagne de solidarité portant sur le syndicalisme, les droits et les droits des citoyen∙ne∙s en général.

Le syndicat a également organisé plusieurs ateliers pour répondre aux différents défis et pour « définir plus avant et redéfinir le concept même d’éducation et d’apprentissage dans un contexte tel que celui de Gaza ».

Il communique également par le biais de divers médias, y compris la radio, et le site Internet du syndicat à propos de toutes les conséquences dévastatrices de la guerre à Gaza, exposant le nombre de victimes, de blessés et la fermeture des écoles par l’État d’Israël, qui refuse l’accès en toute sécurité des enseignant·e·s et des étudiant·e·s aux écoles et aux universités.

Le GUPT a également partagé avec les médias locaux mais aussi internationaux des vidéos « qui donnent une idée claire de ce que fait Israël ». Certain·e·s d’entre vous auront regardé ces vidéos. Le syndicat a traduit ces contenus en espagnol, coréen, japonais, anglais et arabe, et de nombreux·euses bénévoles ont traduit le contenu de ces vidéos pour faciliter l’accès à l’information aux enseignant·e·s du monde entier. « Ces vidéos nous ont permis de mettre en lumière les récits des souffrances des enseignants et enseignants de la bande de Gaza, avec des témoignages et des messages envoyés par les enseignants et enseignantes. Ces messages extrêmement éloquents, extrêmement douloureux, présentent la situation accablante aux enseignants et enseignantes et aux élèves du monde entier. Grâce à la solidarité du mouvement syndical mondial de l’éducation, nous avons pu former plus de 4.000 enseignants et enseignantes à Gaza, ainsi que plus de 600 enseignants et enseignantes en Cisjordanie », a-t-il souligné. « Nous avons inclus l’apprentissage émotionnel afin de disposer de plus de médias et de mécanismes pour communiquer avec les élèves qui sont psychologiquement éprouvés et traumatisés par ce qu’ils et elles voient jour après jour. Nous avons essayé d’utiliser de nouveaux mécanismes d’apprentissage et d’enseignement pour les aider à surmonter leur traumatisme, et cela a été une réussite dans la mesure où nous avons pu renforcer les capacités et former des formateurs et formatrices, dont une majorité de femmes. »

Le GUPT a en outre recours aux réseaux sociaux et à l’apprentissage en ligne et distribue des hashtags à divers syndicats arabes et mondiaux afin d’élargir le champ du public cible, a précisé M. Erziqat.

Le Bureau exécutif de l’IE a récemment publié une déclaration qui souligne que l’IE continuera de réclamer la fin de la guerre, la libération de tou·te·s les otages et la négociation d’une solution qui puisse aboutir à une paix durable. Elle dénonce en outre la destruction massive de vies humaines et les souffrances généralisées causées par la guerre en cours dans la bande de Gaza et les territoires palestiniens occupés.

Atelier de renforcement des capacités de communication à l’intention des éducateur·trice·s d’Égypte

Nizar Ben Salah, secrétaire général de la Fédération générale de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique (FGESRS) en Tunisie, a éclairé les participant·e·s sur le programme de renforcement des capacités de son syndicat. « La campagne La force du public : ensemble on fait école !, qui englobe tou·te·s les enseignant·e·s de Tunisie montre qu’il est primordial de disposer d’un système d’éducation publique de qualité et accessible à toutes et à tous », a-t-il déclaré.

Parlant de « l’ascenseur social », il a noté que ce dernier « a permis en cinq décennies de créer une classe moyenne proactive et éduquée. Il est lié à l’éducation, en particulier à l’enseignement supérieur. »

M. Ben Salah a également évoqué « un nouvel élan insufflé par l’IE grâce à ce travail en réseau, qui nous a permis d’établir des ponts de communication avec différents syndicats ».

Et d’ajouter : « Grâce à cette synergie et à la nouvelle dynamique que nous avons créée, nous avons pu préparer un projet qui nous a permis, dans une phase préliminaire, d’organiser une session de formation sur les communications numériques s’adressant à 29 hauts responsables syndicaux des niveaux central, régional et local. Il s’agissait notamment de garantir leur présence sur les réseaux sociaux, comme TikTok, Facebook, Twitter et toutes les autres plateformes qui ont une présence influente à l’échelle mondiale et sont devenues la première source d’information à travers le monde. » Ce programme de formation de quatre jours a été organisé dans le cadre de la campagne La force du public : ensemble on fait école !, a-t-il indiqué. « Je tiens à saluer la persévérance et les efforts fructueux des 29 participants et participantes, sélectionnés selon le principe de la parité – une femme et un homme de chaque structure syndicale a bénéficié de cette session de formation. »

Son syndicat « réfléchit à présent à d’autres étapes » dans le cadre de la coopération avec le syndicat norvégien Union of Education Norway et l’Internationale de l’Éducation.

« Nous avons également des volontaires qui sont prêts à se rendre à Gaza et en Cisjordanie pour enseigner et reconstruire les universités, afin de ne pas priver les étudiants et étudiantes de leur droit à l’éducation », a expliqué M. Ben Salah.

Enseignements tirés du ComNet Afrique de l’IE

Kojo Asiamah Addo, responsable de projet pour les campagnes et les communications au bureau régional de l’IE pour l’Afrique, a présenté les expériences et les leçons tirées du ComNet Afrique.

« Le bureau régional de l’IE a mis en place le réseau ComNet Afrique, où nous aidons les différents syndicats à diffuser des informations et à communiquer de manière appropriée », a-t-il expliqué.

Il a poursuivi en expliquant que, à travers le ComNet Afrique, « nous formons nos syndicats membres à comprendre les différentes parties prenantes de la chaîne de valeur de l’éducation, à les approcher et à utiliser les différents outils de communication pour échanger avec elles ».

Ensuite, nous nous efforçons d’avoir un impact, a-t-il observé. « Impact signifie que nous nous concentrons fortement sur la campagne La force du public : Ensemble on fait école !, qui a pour principaux objectifs de promouvoir le financement de l’enseignement public, de garantir l’accès des étudiants et étudiantes et de freiner par là même la tendance à la privatisation de l’éducation. »

Il a également souligné que dans de nombreux pays africains, les syndicats ont élaboré leur propre matériel de campagne et que, selon le cas, ils optent pour les réseaux sociaux, les médias traditionnels, ou encore des entretiens en personne avec les gens. « Ils font de leur mieux pour expliquer l’importance de l’enseignant et de l’enseignante dans le secteur de l’éducation et ont donc de plus en plus recours à la campagne La force du public : ensemble on fait école !, qui appelle les gouvernements à veiller à ce que chaque enfant du continent africain puisse bénéficier d’une éducation de meilleure qualité, soit enseigné par un enseignant qualifié et bien rémunéré, qui soit motivé pour aller dans la salle de classe chaque jour et enseigner. »

La réunion inaugurale du ComNet de la SIRPA a marqué une étape importante dans la lutte pour les droits des éducateur·trice·s et une éducation de qualité dans la région arabe. Comme en ont convenu les participant·e·s, cette réunion n’est que le début d’une longue route vers la solidarité, le renforcement des capacités d’action et la paix.