Ei-iE

UNESCO Teachers' Summit
UNESCO Teachers' Summit

Le Consensus historique de Santiago place les enseignant·e·s au cœur de la transformation de l’éducation

Le Sommet mondial sur les enseignant·e·s offre un cadre global appelant à un investissement durable dans la profession enseignante

Publié 29 août 2025 Mis à jour 2 septembre 2025

Les ministres, syndicats et responsables de l’éducation réunis au Chili dans le cadre du Sommet mondial sur les enseignant·e·s ont adopté le Consensus de Santiago, un cadre global qui engage les gouvernements à remédier à la pénurie mondiale de 50 millions d’enseignant·e·s, au travers de mesures politiques concrètes.

Ce Consensus, élaboré au cours de deux journées de négociations intensives, définit six axes prioritaires pour transformer la profession enseignante : renforcer les politiques relatives aux enseignant·e·s, transformer le développement professionnel, établir un véritable dialogue social, assurer un financement durable, préparer les enseignant·e·s à l’avenir numérique et garantir l’inclusion et l’équité.

« Le Consensus de Santiago démontre le pouvoir des enseignants et enseignantes organisés qui s’expriment d’une seule voix unifiée. Nous retournons dans nos pays respectifs avec bien plus que des déclarations couchées sur papier, nous avons entre les mains un nouveau mandat pour transformer l’éducation. Ce Consensus confirme ce que nous savons depuis toujours : sans les enseignants et enseignantes, il n’y a aucun avenir. Aujourd’hui, cette vérité est reconnue à l’échelle mondiale et s’accompagne d’engagements concrets à prendre des mesures. Mais le véritable travail commence maintenant : faire en sorte que les gouvernements respectent leurs engagements et garantir que la voix de la profession enseignante demeure centrale dans l’élaboration des politiques éducatives. »

David Edwards, secrétaire général de l'Internationale de l'Éducation

« Il s’agit d’un moment décisif pour transformer les recommandations des Nations Unies sur la profession enseignante en actions concrètes ayant une incidence sur chaque classe, chaque école, chaque communauté éducative », a ajouté le président de l’IE, Mugwena Maluleke. « Les enfants nous regardent. L’avenir nous regarde. Et l’histoire nous jugera, non pas pour nos promesses, mais pour les priorités que nous aurons choisies. Non pas pour nos paroles, mais pour ce que nous aurons financé. Le monde doit savoir que, à Santiago, nous avons choisi le courage plutôt que la facilité, la justice plutôt que le silence, et l’éducation plutôt que les excuses. »

Six piliers pour la transformation

Le Consensus de Santiago exige des politiques nationales de grande envergure pour les enseignant·e·s, couvrant l’ensemble du cycle professionnel et accompagnées de l’engagement des gouvernements à leur offrir des conditions de travail décentes, des salaires compétitifs et des charges de travail réalistes et à respecter leur bien-être, tout en reconnaissant que l’autonomie pédagogique et la collaboration entre collègues sont des éléments essentiels pour garantir leur performance et leur rétention.

Le cadre établit six domaines d’action prioritaires directement alignés sur les revendications de l’Internationale de l’Éducation qui rythment sa campagne « La force du public : ensemble on fait école ! » :

  • Politiques nationales de grande envergure pour les enseignant·e·s couvrant l’ensemble du cycle professionnel, depuis le recrutement jusqu’à la progression de la carrière, en accordant une attention particulière aux zones rurales et mal desservies où les pénuries sont plus importantes.
  • Développement professionnel tout au long de la vie transformant la formation des enseignant·e·s en une entreprise collaborative, en établissant des liens clairs entre formation initiale, insertion professionnelle, mentorat et offres de formation continue.
  • Dialogue social établissant des mécanismes permanents et transparents pour assurer la participation des enseignant·e·s à l’élaboration des politiques. Le Consensus reconnaît explicitement les syndicats de l'éducation en tant que partenaires légitimes pour la gouvernance de l’éducation.
  • Financement durable allant au-delà de la théorie, accompagné d’engagements concrets visant notamment à mobiliser les ressources nationales et à mettre en œuvre des mécanismes de financement inédits pour protéger l’éducation en tant que bien public.
  • Préparation à l’enseignement du futur, en renforçant les compétences en matière d’outils numériques et d’intelligence artificielle, tout en préservant la dimension relationnelle de l’apprentissage. Point important, le Consensus appelle à l’adoption du Référentiel de compétences en IA de l’UNESCO pour les enseignant·e·s.
  • Inclusion et équité assurant la diversité au sein de la profession enseignante, afin de refléter la diversité des communautés et d’éliminer les barrières structurelles entravant la possibilité pour les groupes marginalisés d’entrer dans la profession enseignante.

Le Consensus s’attaque au problème du sous-financement chronique de l’éducation en appelant à la mobilisation des ressources nationales pour mettre en place des politiques de grande envergure pour les enseignant·e·s, tout en reconnaissant explicitement que la crise de la dette ne cesse de s’aggraver et affecte en particulier les pays à revenu faible et intermédiaire.

Le Consensus appelle à la création de fonds solidaires alignés sur l’Objectif de développement durable 4.c pour financer la profession enseignante, en apportant notamment un soutien spécialisé aux enseignant·e·s en situation d’urgence ou de crise : versement régulier des salaires, assistance psychosociale et reconnaissance internationale des qualifications des enseignant·e·s réfugié·e·s.

Élément crucial, le Consensus reconnaît que la jeune génération joue un rôle essentiel pour remédier aux pénuries d’enseignant·e·s et appelle à soutenir les « initiatives émanant de la jeunesse » qui promeuvent la profession enseignante en tant que choix de carrière viable et gratifiante. Cette approche visionnaire soutient que les étudiant·e·s d’aujourd’hui représentent potentiellement le personnel enseignant de demain. Leur engagement se veut donc un point central des solutions à long terme plutôt qu’un élément périphérique de l’élaboration des politiques.

Protéger le plus important

Point peut-être plus important encore, le Consensus intègre un principe pour lequel l’Internationale de l’Éducation s’est battue : la reconnaissance de la relation entre l’enseignant·e et l’étudiant·e en tant que processus relevant du patrimoine commun de l’humanité. Bien plus qu’une reconnaissance symbolique, il s’agit d’un engagement à préserver la relation humaine qui s’exprime au sein de l’éducation, face à l’empiétement de solutions purement technologiques.

Le document mentionne explicitement que la technologie éducative « se doit d’être au service de l’humanité et ne saurait compromettre le rôle essentiel de socialisation et d’interaction humaine dans l’éducation ». Cette déclaration reflète le plaidoyer de l’IE en faveur d’un enseignement dont les fondements sont avant tout relationnels, et non transactionnels.

« Le Consensus de Santiago le souligne clairement : la relation entre l’enseignant ou l’enseignante et l’élève relève du patrimoine commun de l’humanité et doit être protégée et bénéficier de ressources adéquates. Aucune technologie ne peut remplacer cette relation humaine. En la défendant, nous défendons une école publique démocratique. Cela signifie pouvoir consacrer du temps à l’enseignement et protéger l’autonomie professionnelle, de manière à ce que la technologie soit au service de l’apprentissage et non l’inverse. »

Manuela Mendonça, membre du Bureau exécutif de l’IE et de l’organisation syndicale portugaise Federação Nacional dos Professores (FENPROF)

Du consensus à l’action

Plus qu’une déclaration ambitieuse, le Consensus de Santiago établit des mécanismes de responsabilisation concrets. Les gouvernements feront état de leurs avancées via le « SDG4 Knowledge Hub », avec un suivi régional renforcé, et seront encouragés à s’aligner sur les engagements pris au Sommet dans leurs Examens nationaux volontaires.

Le Consensus invite également les États membres à convoquer un nouveau Sommet sur les enseignant·e·s dans les années à venir, en vue d’établir un bilan, suivre les avancées et maintenir les enseignant·e·s au centre du Programme 2030.

En ce qui concerne le financement, le Consensus appelle à la reconstitution des fonds du Partenariat mondial pour l’éducation et d’Education Cannot Wait, soulignant que la coopération internationale demeure essentielle pour remédier aux pénuries d’enseignant·e·s, en particulier en situation de crise et en présence d’un manque de ressources.

Le Sommet lui-même a démontré le pouvoir du plaidoyer coordonné. L’internationale de l’Éducation s’est rendue à Santiago pour y représenter 33 millions de travailleurs et travailleuses de l’éducation et présenter leurs revendications unifiées : salaires équitables, conditions de travail décentes, sécurité d’emploi, charges de travail réalistes, établissements scolaires correctement équipés, autonomie professionnelle et participation concrète aux politiques.

Le Consensus engage les gouvernements à procéder aux changements structurels nécessaires pour faire de l’enseignement une profession respectée et financée de manière appropriée. Ce dernier s’appuie sur 18 mois de suivi des recommandations des Nations Unies sur la profession enseignante. L’Internationale de l’Éducation et ses organisations membres soutiendront sa mise en œuvre et assureront le suivi des avancées, par le biais des mécanismes décidés en concertation.